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Actu Maroc

Conséquences vaccinales : Vers une prolifération des procès administratifs ? [INTÉGRAL]


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mardi 16 Juillet 2024

Nombreuses sont les victimes d’effets secondaires graves du vaccin d’Astra Zeneca, reconnues par la tutelle. L’Etat risque-t-il d’autres procès après celui de Najat Touati. Décryptage.



Plusieurs semaines après l’éclatement de la polémique sur les effets secondaires du vaccin Astra Zeneca, le ministère de la Santé, dont le mutisme a suscité beaucoup d’incompréhensions, a finalement brisé le silence en livrant des détails inédits sur l'administration de ce sérum controversé au Royaume. Nous étions dans le flou total d’autant qu’il n’y a pas assez d’informations sur le nombre de personnes vaccinées par ce vaccin commandé en 2021 auprès du laboratoire indien Serum Institute of India. L’inquiétude ne quitte jamais l’esprit des gens qui se sont fait injecter ce vaccin et qui pensent, à tort ou à raison, qu’un effet secondaire surgit tardivement dans leur chair. Depuis le début de la campagne de vaccination, plus de 8,86 millions de doses d’Astra Zeneca ont été administrées par les autorités compétentes, selon les données dévoilées par le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Ait Taleb, dans une correspondance parlementaire.
 
Astra Zeneca : Meilleure visibilité sur les dommages collatéraux
 
Depuis lors, 54.423 cas d’effets secondaires ont été recensés au Maroc. Parmi les cas susmentionnés, 13.542 cas ont été déclarés par les victimes, dont 211 ont subi des cas graves, selon les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Khalid Ait Taleb a rappelé qu’il n'y a eu au Royaume aucun cas de thrombose (caillot sanguin) mortelle. Il a jugé que les effets secondaires sont un phénomène normal qui peut surgir parfois lorsque le système immunitaire réagit à l’injection des vaccins dans le sang en entraînant un fort flot sanguin pour stimuler l’action des cellules immunitaires. Par conséquent, cela pourrait provoquer des effets indésirables dans certains cas. Cet argument est souvent avancé par les autorités sanitaires lorsqu’il s’agit de cas pareils. Généralement, les médecins rassurent en réitérant souvent que les effets secondaires surgissent généralement dans les premiers jours suivant la vaccination. Or, comme les vaccins anti-Covid-19 furent développés en un temps record, contrairement aux procédures normales où cela prend des années, l’incertitude domine les esprits sceptiques.
 
Le cas de Najat Touati ne quitte pas les esprits !
 
Maintenant, le ministère de la Santé reconnaît publiquement l'existence de cas graves dus à l'injection du vaccin, à l’instar de celui de Najat Touati, la professeure de biologie qui a pu faire condamner l’Etat à l'indemniser après une longue bataille judiciaire où elle est parvenue à établir le lien de causalité entre l’injection du vaccin et le syndrome Guillain Barré qui lui a causé une incapacité physique partielle.
 
Le Tribunal administratif de Rabat a condamné l’Etat à lui verser 250.000 dirhams de dédommagements. La sentence, rappelons-le, n’est pas encore exécutée parce que l’Etat, représenté par le ministère de la Santé et l’Agent judiciaire du Royaume, a fait appel du verdict. Dans le procès de première instance, la responsabilité de l’Etat a été établie. Les juges ont estimé que l’Etat est responsable du moment qu’il a incité les citoyens à se faire vacciner sous peine de quelques restrictions de liberté de déplacement, en référence au pass vaccinal. A cela s’ajoute un autre élément irréfutable : l’homologation accordée au vaccin par le ministère de la Santé sur la base d’un avis favorable du Comité scientifique. Ce-faisant, l’Etat avait jugé que le vaccin ne portait aucune menace qui empêcherait qu’il soit administré à la population. Il en est donc responsable. “En dépit des arguments de la défense de l’Etat, il serait difficile d'imaginer qu’il sera disculpé en appel d’autant que sa responsabilité a été prouvée à la fois par des éléments de droit interne et du droit international”, nous explique une source proche du dossier, en faisant allusion à la Résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies n°57.150 qui attribue aux Etats  la prise en charge des victimes de catastrophes naturelles et des situations d’urgence sur son propre sol.
 
Vers d’autres procès
 
Maintenant qu’il existe une jurisprudence, aussi embryonnaire soit-elle, qui puisse permettre de trancher des différends relatifs aux conséquences de la vaccination, plusieurs personnes concernées pourraient s’aviser de tenter l’aventure judiciaire d’autant plus qu’elles ont constaté qu’on peut obtenir gain de cause auprès de la Justice, et que le laboratoire fabriquant a reconnu lui-même que son vaccin peut produire des effets secondaires rares, notamment des cas de thrombose avec thrombopénie syndrome, caractérisés par la formation de caillots sanguins et une faible numération plaquettaire. Or, il y a un élément non négligeable qui ne passe pas inaperçu. Khalid Ait Taleb a assuré que les personnes ayant eu des effets secondaires ont bénéficié d’un suivi médical régulier et d’une “prise en charge gratuite”, y compris toutes les analyses médicales qui vont avec. “Là, il convient de savoir si la prise en charge peut constituer une circonstance atténuante pour l’Etat en cas de procès”, s’interroge un avocat spécialiste de la Justice administrative qui a requis l’anonymat vu qu’il s’agit d’une affaire en cours. Force est de rappeler que dans le cas de Najat Touati, elle n’a bénéficié d’aucune prise en charge et elle a payé elle-même tous les frais de son hospitalisation. Le ministère de la Santé estime avoir pris toutes les dispositions pour la gestion optimale de tous les cas d’effets secondaires. Il a mis en place un système de suivi des effets secondaires avec une plateforme de réclamation au niveau du Centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc (CAPM).
 
Par ailleurs, il existe une autre piste de réclamation en dehors du cadre étatique, à savoir l’Organisation Mondiale de la Santé qui a livré également des vaccins au Maroc dans le cadre du programme COVAX. L’Organisation onusienne, rappelons-le, a mis en place un système d'indemnisation en faveur des victimes d’effets secondaires des vaccins livrés dans le cadre du programme susmentionné. Il s’agit d’un système de compensation en cas de dommage lié à la vaccination auquel sont éligibles les ressortissants des pays bénéficiaires ayant subi un effet indésirable dû à un vaccin anti-Covid administré avant le 30 juin 2023.
 
Anass MACHLOUKH

Trois questions à Maryam Bigdeli : “Les procédures régulatoires qui permettent l’utilisation du vaccin relèvent de la responsabilité du pays concerné”

Extrait d’une interview sur ce sujet, accordée par la représentante de l’OMS au Maroc, Maryam Bigdeli, à « L’Opinion ».
Extrait d’une interview sur ce sujet, accordée par la représentante de l’OMS au Maroc, Maryam Bigdeli, à « L’Opinion ».
  • Il existe un mécanisme de compensation des victimes d’effets secondaires de vaccins livrés dans le cadre du programme COVAX, supervisé par l’OMS. Est-ce accessible à tout le monde, y compris aux ressortissants marocains ? 

 

Ces mécanismes d’indemnisation sont transférés aux Etats dans le cadre du mécanisme COVAX qui est un mécanisme d’accès aux vaccins afin que les pays puissent accéder aux stocks disponibles de façon équitable. Les procédures régulatoires qui permettent l’utilisation du vaccin dans un pays donné relèvent de la responsabilité du pays. En effet, ce mécanisme a prévu une responsabilité et un engagement signé du pays à indemniser les patients vaccinés par les vaccins Covid-19 qui ont été sujet à des effets secondaires et qui ont demandé une compensation “COVAX indemnification agreement”.

 

  • Faut-il, à votre avis, une loi spécifique à la gestion des pandémies et des campagnes de vaccination, au lieu de se contenter de prendre des mesures exceptionnelles ?

 

Le plan de préparation et de riposte aux urgences de santé publique permet d’activer les mécanismes nécessaires. Ces mesures que vous qualifiez d’exceptionnelles sont inscrites au plan et activées selon le degré d’urgence et les nécessités de riposte.

 

  • Le tribunal administratif de Rabat a donné gain de cause à une victime d’effets secondaires d’Astra Zeneca contre l’Etat, condamné à verser une indemnité. A votre avis, faut-il mettre en place un mécanisme formel pour indemniser les victimes dans les années à venir pour limiter le recours aux tribunaux puisqu’il s’agit d’une procédure laborieuse qui prendra beaucoup de temps ?

 

Pour ma part, il s’agit d’une affaire judiciaire sur laquelle on ne peut pas se prononcer. Dans ce domaine, je précise que ce genre de questions relève des Etats. Ce sont eux qui décident des procédures juridiques les plus adéquates selon leur contexte.

Covid-19 : Encore mortelle…

Le Maroc a lancé sa campagne nationale de vaccination contre la Covid-19 le 28 janvier 2021. Depuis lors, 24.924.887 personnes ont été vaccinées, dont 23,4 millions ont eu la deuxième injection et 6.8 millions la troisième. 8,8 millions de doses du vaccin Astra Zeneca ont été administrées. Par ailleurs, quatre ans après le début de la pandémie, le SARS-COV 2 est toujours périlleux, selon l’OMS qui a indiqué, jeudi dernier, que le virus fait encore environ 1.700 morts par semaine dans le monde. Au Maroc, le virus semble avoir l’effet d’une grippe. Selon son dernier bulletin hebdomadaire, le ministère de la Santé et de la Protection sociale a fait état de 12 nouveaux cas d’infection au Covid-19, sans signaler de cas de décès. Actuellement, il y a 15 cas actifs. Au total, 1,2 million de contaminations ont été recensées au Royaume depuis le 2 mars 2020, avec un taux de positivité hebdomadaire de 6%. Le nombre total des décès est toujours de 16.307 (létalité générale : 1,3%).

Astra Zeneca : Un vaccin aux oubliettes !

Aujourd’hui, le vaccin d’Astra Zeneca n’est qu’un lugubre souvenir puisqu’il n’est plus vendu et en cessation de production. Le 8 mai 2024, le laboratoire britannique l’a retiré des marchés. Cette décision a été prise par le laboratoire. Ce retrait serait dû, selon l’argumentaire du fabricant, au recul de la demande et au fait que le vaccin, trois ans après son développement, ne serait plus adapté à la demande. «Étant donné que de multiples vaccins contre le Covid-19 ont été développés, il y a un surplus de vaccins mis à jour», «ce qui s’est traduit par un déclin de la demande», avait indiqué le géant pharmaceutique dans un communiqué relayé par l’AFP.

Il y a eu plusieurs rumeurs sur une supposée implication de l’Agence européenne du médicament (EMA), qui aurait retiré au laboratoire son autorisation de mise sur le marché en raison d’effets indésirables graves. Mais, l’Agence européenne a rapidement précisé que l’autorisation de vente du vaccin avait été retirée à la demande du laboratoire. Le retrait du vaccin a été décidé peu de temps après que le laboratoire ait admis l’existence d’éventuels effets secondaires rares dans des documents judiciaires révélés par la presse internationale. 

Depuis les premiers mois de son homologation à l’échelon international, ce vaccin a été plusieurs fois contesté, sachant qu’il n’a pas reçu d’autorisation de mise en marché aux États-Unis. A cela s’ajoutent les nombreuses polémiques liées aux risques de thrombose accrue.








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