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Tragédie tangéroise : Les conditions de travail au cœur du débat


Rédigé par Nabil LAAROUSSI Mercredi 10 Février 2021

Des conditions de travail indignes ont entraîné la mort de plusieurs employés dans un sous-sol à Tanger. La société Amendis et les élus de la Wilaya de Tanger se retrouvent pointés du doigt dans une affaire qui interpelle et mobilise l’opinion publique.



Tragédie tangéroise : Les conditions de travail au cœur du débat
50 milimètres d’eau, et quelques heures de pluies ont suffi, pour saturer l’infrastructure d’assainissement de la « Capitale du Nord » causant une inondation qui a coûté la vie à 29 personnes piégées dans une usine de textile « clandestine » opérationnelle depuis 20 ans dans le sous-sol d’une villa à Hay Ennasr !

Alors que les spéculations sur la cause des décés vont bon train, les sources officielles évoquent la noyade, toutefois, des témoignages suggèrent la possibilité d’une mort par électrocution. Au lendemain de ce drame qui a secoué la ville du détroit, la presse faisait écho d’une délégation de haut niveau qui se serait déplacée sur place afin de déterminer les détails de la catastrophe et rendre visite aux familles des défunts.

L’atelier où a eu lieu la tragédie interpelle sur les enjeux de la sécurtié au travail et remet également audevant de la scène la question des unités industrielles clandestines où des milliers de Marocains évoluent dans des conditions dénuées de toutes mesures de sécurité et de confort de travail, en raison du manque d’attractivité des zones industrielles pour les TPE.

D’ailleurs, cette question fondamentale, qu’est la sécurité au travail, a tout récemment été au cœur d’un atelier de restitution virtuelle, dédié à la présentation de l’avis du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) quant à la santé et la sécurité au travail, et donnant suite à une étude qu’il a menée aussi bien dans les secteurs publics et privés qu’auprès du secteur informel.

Lors de cet atelier, Ahmed Réda Chami, président du CESE, a rappelé qu’au Maroc, environ 2.000 décès par an sont liés à des accidents de travail, selon le Bureau International du Travail (BIT). Le président du CESE a appelé lors de son intervention à « entreprendre une réforme du système de santé et de sécurité au travail fondée sur une vision globale et non sur des initiatives ou des actions sporadiques », et à « redoubler d’efforts afin de remédier aux carences et de faire progresser les normes de santé et de sécurité dans notre pays ».

« Amendis » en ligne de mire 

A la suite de cette catastrophe, le Parti de l’Istiqlal et la Jeunesse Istiqlalienne ont publié un communiqué conjoint dans lequel ils pointent du doigt les responsables du drame.

A ce titre, les signataires attribuent la responsabilité entière du drame aux élus qui témoignent d’une grande négligence dans le contrôle et le suivi de la gestion de la société déléguée. 

Les istiqlaliens ont également condamné « l’insouciance flagrante » de la société Amendis, responsable de la gestion des services d’assainissement dans la ville. Zouheir Loukili, secrétaire de la section locale de Souani, nous explique dans ce sens que « depuis l’arrêt de travail d’Amanor, habituellement en gestion déléguée de l’assainissement, suite aux grèves de ses employés, Amendis a signé un contrat avec une petite entreprise qui n’est pas de taille à gérer l’infrastructure de la ville de Tanger ».

Aussi, les signataires ont appelé les autorités concernées à mettre fin aux activités économiques et industrielles « clandestines » et informelles, situées dans des quartiers résidentiels où les conditions de travail sont déplorables et ne procurent même pas le minimum de protections aux employés. Une « clandestinité » qui relève de l’euphémisme, selon Loukili.

In fine, les trois secrétaires respectifs des sections locales de Tanger, Souani et Béni Makada, signataires du communiqué, ont appelé le gouvernement à accélérer le renforcement des mécanismes légal, administratif et institutionnel à même de protéger les employés de ce genre d’incidents qui découlent du non-respect des mesures de sécurité au travail.

Nabil LAAROUSSI

3 questions à Lahcen Haddad

Lahcen Haddad
Lahcen Haddad
« Il faut attendre la fin de l’investigation et là on aura des choses à dire par rapport aux parties responsables »

Lahcen Haddad, ex-ministre du Tourisme et député istiqlalien à la Chambre des Représentants, nous donne une lecture du drame de Tanger.

- Quelle est votre lecture du drame de Tanger qui soulève l’indignation de l’opinion publique nationale ?

- C’est un drame choquant, qui ne devrait pas avoir lieu. L’on est surout choqué par le fait que ce soit une unité informelle. Pour l’instant, personne n’a émis de déclaration ou réagi dans une quelconque administration. Tout le monde se demande où sont le ministère de l’Emploi, les inspecteurs de travail, le caïd, le mokkadem, le cheikh … ? Certes, les opérateurs de l’informel font preuve d’ingéniosité pour cacher leurs activités illégales, mais un minimum de vigilance peut réduire l’ampleur du travail informel.

- A qui incombe la responsabilité ?

- Il est impossible d’avoir une usine qui travaille de manière informelle dans une cave qui n’est pas controlée ! Il y a actuellement une investigation qui est ouverte pour mettre les choses au clair. Ce n’est qu’après que nous pourrons déterminer les parties responsables de cette tragédie. Pour le moment, il y a une responsabilité politique du gouvernement. En effet, la responsabilité revient aux différents ministères concernés. Maintenant, il faut attendre la fin de l’investigation et là on aura des choses à dire par rapport aux parties responsables.

- Où en est-on avec la régularisation du secteur informel ?

- Le gouvernement ne cesse de parler de régularisation, et nous retrouvons quand même aujourd’hui des unités qui emploient des dizaines de personnes dans l’informel. Il y a toute une littérature qui a été produite sur la question, le CESE s’est prononcé sur la question de la santé et la sécurité de travail dans son avis. Reste à savoir quelles mesures réelles seront déployées pour apporter les réponses effectives à ce genre de problématiques.

Recueillis par N. L.

Repères

Une loi-cadre en stand-by depuis 10 ans
Initié depuis dix ans, le projet de loi-cadre relative à la sécurité et à la santé au travail tarde encore à être promulgué. L’élaboration dudit projet est notamment apparue dans l’avis du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) qui a également préconisé la création d’un Institut national des conditions de vie au travail (INCVT) après le drame de Rosamor en 2008, ansi que l’élaboration de la politique nationale et du programme national de santé et de sécurité au travail pour la période 2020-2024.
Le « Cadre Sendai » pour la réduction des risques de catastrophes naturelles
Lors du Conseil de gouvernement, tenu le 4 février 2020, le ministère de l’Intérieur a dévoilé son plan d’action national 2020-2030 de gestion des risques de catastrophes naturelles. Dans ce sens, le Royaume du Maroc s’est engagé depuis 2017, dans le cadre d’une approche intégrée et globale et avec la contribution de partenaires internationaux, à la préparation d’un projet de plan d’action national pour encadrer la politique de gestion des risques naturels, et ce, afin de protéger la vie et les biens des citoyens contre les effets des catastrophes naturelles, de réduire la vulnérabilité vis-à-vis de leurs risques et de renforcer la capacité de la population et des provinces à y faire face.








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