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Statut des enseignants-chercheurs : Vers la fin du clash entre Miraoui et les syndicats ?


Rédigé par Anass MACHLOUKH Jeudi 25 Août 2022

Le nouveau statut des enseignants-chercheurs continue de faire l’objet de discussions intenses entre le ministre de tutelle et les Syndicats. Voici les principaux points de divergence.



Redresser l’Université marocaine est un objectif partagé par le gouvernement et les syndicats de l’enseignement supérieur. Mais la méthode pour parvenir à cet idéal oppose ces derniers, qui ne sont pas encore parvenus à un accord définitif sur la question épineuse de la réforme du statut particulier du corps des enseignants-chercheurs de l’enseignement supérieur, au ministre de tutelle, Abdellatif Miraoui. Il s’agit là du pilier de la réforme promise par le ministre et qui sera finalisée en 2023. Refaire le cadre légal régissant les enseignants-chercheurs est tellement complexe que le Statut particulier est resté figé depuis 1997. Date de sa mise en place.

En attente d’une réunion tendue !

Des sources proches du dossier nous ont indiqué que le ministre et les syndicats se sont donné rendez-vous cette semaine pour organiser une réunion. Celle-ci sera décisive car il y serait question des principaux points de divergence au sujet du sort des enseignants. Rappelons que les syndicats revendiquent la réforme depuis des années, nous indique Jamal Sebbani, Secrétaire général du Syndicat national de l’Enseignement supérieur. Les pourparlers ont abouti à un accord de principe sur le projet porté par l’ex-ministre Saïd Amzazi, mais l’arrivée du nouveau gouvernement et la volonté du nouveau ministre d’apporter sa touche personnelle a différé sa sortie.

Abdellatif Miraoui, rappelons-le, veut que la fonction des enseignants soit encadrée conformément à l’esprit du nouveau modèle de développement. Raison pour laquelle il plaide pour des “enseignants chercheurs de nouvelle génération”. Ces derniers devraient être en principe reclassés selon deux nouvelles catégories, à savoir “Maître de conférences” et “professeur de l’enseignement supérieur”. L’actuel statut, rappelons-le, en prévoit trois, à savoir “le professeur de l’enseignement supérieur”, “le professeur habilité”, et “le professeur-assistant”. Ces nouvelles classifications sont, toutefois, provisoires et non définitives.

La limite d’âge, le grand désaccord

Des sources ministérielles bien informées nous ont confié que le nouveau statut contiendra plusieurs changements par rapport au précédent. En prenant acte des doléances des syndicats, on s’aperçoit que la première pomme de discorde concerne l’accessibilité de la profession, sachant que l’âge limite est fixé à 45 ans. Une limite qui ne convient pas aux syndicats qui y voient une entrave à l’attraction des compétences marocaines à l’étranger qui souhaitent revenir à la mère patrie. En effet, l’article 7 du statut actuel stipule que l’accès à la fonction “est ouvert aux candidats âgés de 40 ans au plus au 1er janvier de l’année en cours”. “Cette dernière limite d’âge pourra être prorogée d’une durée égale à celle des services valables ou validables pour la retraite sans qu’elle puisse être reportée au-delà de 45 ans”, lit-on sur le texte de loi, qui prévoit cependant une dérogation pour les fonctionnaires. La limite d’âge n’est pas opposable aux candidats fonctionnaires conformément aux dispositions du décret n° 2-92-231 du 29 avril 1993.

Par ailleurs, la question de l’ouverture sur les profils étrangers n’est pas sur la table. Il existe un autre souci lié à l’accessibilité, la non prise en compte de l’expérience préalable à l’entrée en fonction. La limite d’âge, telle que prévue par la loi, permet de recruter les jeunes profils mais rend difficile, voire impossible, selon M. Sebbani, de tirer profit des profils expérimentés qui veulent travailler avec l’Etat en tant qu’enseignants-chercheurs. Toujours sur la question des ressources humaines, les syndicats demandent une hausse des postes budgétaires dévolus au secteur, pour pallier le risque de pénurie qui menace notre pays. (voir repères). La réforme promet d’accoucher d’un système plus attractif pour les enseignants.

Durant les multiples prises de parole sur ce sujet, Abdellatif Miraoui n’a pas caché sa volonté d’accorder aux enseignants de nouvelles incitations. Les syndicats, pour leur part, insistent sur les perspectives de carrière qu’ils souhaitent voir s’améliorer, en plaçant leurs espoirs sur une formule ingénieuse du ministère. Les enseignants, du moins les syndiqués, se plaignent de ce qu’ils appellent “des perspectives mornes”, arguant que le plafond de l’évolution est rapidement atteignable.

En plus des perspectives de carrière, les enseignants revendiquent une revalorisation salariale. Aujourd’hui, un enseignant en début de parcours perçoit un salaire de 13.000 DH, qui peut augmenter jusqu’à 26.000 dirhams avec l’ancienneté et l’évolution dans le grade.

Méritocratie : La monnaie d’échange

Le ministre de tutelle semble ouvert à la hausse des salaires, mais en contrepartie, il veut plus de rendement. Abdellatif Miraoui est déterminé à mettre de nouveaux critères de performance en contrepartie des motivations salariales. C’est pour cette raison qu’il parle d’enseignants de nouvelle génération qui soient ouverts sur les “Soft et power Skills” et qui maîtrisent les langues étrangères et les outils numériques. En plus de cela, le séjour scientifique à l’étranger est également exigé.

En définitive, la réforme se revendique de la méritocratie, raison pour laquelle la production scientifique devrait également figurer parmi les critères d’évolution, vu les chiffres dérisoires des publications scientifiques. Nous ne sommes qu’à 0,37 publication par enseignant-chercheur par année.



Anass MACHLOUKH

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Statut des enseignants-chercheurs  :  Vers la fin du clash entre Miraoui et les syndicats ?

Evaluation des performances


Ce qu’en pensent les syndicats !
 
Dans sa volonté de pousser les enseignants à améliorer leur productivité, Abdellatif Miraoui veut mettre en place un système d’évaluation de la performance des professeurs. Interrogé sur ce point, le Secrétaire général du Syndicat national de l’Enseignement supérieur estime que le système actuel est d’ores et déjà basé sur un système d’évaluation du moment que le processus de sélection est strict. “Pour intégrer la fonction, il faut disposer d’un doctorat en plus du concours, et d’une habilitation pour pouvoir exercer en tant que professeur habilité. Cela existe déjà, sachant que la progression est conditionnée par le rendement scientifique. En effet, pour passer d’un échelon à un autre, les enseignants doivent remplir certains critères, à savoir les publications, les travaux d’encadrement et d’autres activités académiques.
 

Départs à la retraite

 
Le spectre de la pénurie
 
D’ici 2030, plus de 4744 professeurs universitaires vont partir à la retraite, selon les chiffres du ministère de tutelle. Dans les années à venir, 527 professeurs partiront annuellement à la retraite, ce qui fait que 4744 personnes quitteront leurs postes entre 2022 et 2030. Les filières scientifiques et techniques demeurent les plus touchées par les départs à la retraite, avec 64% des professeurs concernés (3030). D’où l’urgence de trouver la relève, sachant qu’actuellement, les Universités comptent environ 20.771 professeurs permanents, soit une hausse de 4,1% par rapport à l’année universitaire 2021-2022.

Cette hausse demeure inférieure à celle du nombre global des étudiants qui a augmenté de 8,5%, sachant que celui des nouveaux étudiants a augmenté de 10,3% pendant la dernière rentrée universitaire. Le ministère de tutelle compte, pour sa part, recruter des professeurs de “nouvelle génération”, selon la formule chère à Abdellatif Miraoui.

Le ministre n’écarte pas la possibilité de faire appel aux compétences marocaines à l’étranger. Mais la question de la limite d’âge pour l’accès à la profession pose problème pour les syndicats qui partagent tout de même la volonté du ministre de s’ouvrir sur les compétences étrangères. En plus des compétences venues de l’étranger, Miraoui veut chercher le personnel qualifié, en puisant dans les postes alloués aux fonctionnaires porteurs de doctorat auxquels sont alloués des postes budgétaires.
 

3 questions à Jamal Sebbani

Statut des enseignants-chercheurs  :  Vers la fin du clash entre Miraoui et les syndicats ?


« Le Statut actuel empêche l’arrivée de nouvelles compétences »
 
Jamal Sebbani, Secrétaire général du Syndicat national de l’Enseignement supérieur, a répondu à nos questions sur les doléances des syndicats.

- Pourquoi la réforme du statut a-t-elle pris autant de temps ?

- Cela fait vingt-cinq ans que le cadre légal n’a subi aucun changement, il a d’ailleurs affiché des limites dès sa mise en place, si je puis dire. Ceci nous a incités, en tant que syndicat, à appeler depuis longtemps à la revendication de sa réforme en profondeur. Ce n’est qu’à partir de 2011 qu’on a commencé à parler sérieusement de la nécessité de cette réforme. Après des discussions qui ont duré des années, avec les trois ministres précédents, nous sommes parvenus à un accord en avril 2021 sur une première version du nouveau statut avec le ministère de tutelle. Après l’arrivée du nouveau ministre, la réforme a dû être changée selon sa propre vision. Depuis lors, nous attendons toujours sa finalisation.


- Concernant vos discussions avec le ministère de tutelle, où en êtes-vous ?

- Le ministère de tutelle nous a assuré que le processus de la réforme est suivi de près par le Chef du gouvernement et que les contacts sont en cours avec le ministère de l’Economie et des Finances pour finaliser les aspects budgétaires. Nous attendons toujours.


- Expliquez-nous davantage vos revendications ?

- Pour nous, le principal problème auquel il faut remédier est celui de l’accessibilité de la profession. Si vous m’autorisez l’expression, il n’y a qu’une seule porte d’entrée. C’est à dire que l’expérience des enseignants ne compte pas lors de leur recrutement. On a beau avoir des années d’expérience, on doit, hélas, partir de zéro quand on commence une carrière avec l’Etat. En plus, cela pose également des problèmes pour les compétences marocaines à l’étranger qui souhaitent revenir. Force est de constater que l’âge maximum pour intégrer la fonction est de 45 ans.

Tout cela nous empêche d’attirer les compétences. En plus, il est évident que les salaires doivent augmenter pour que la profession redevienne attractive. Les salaires, tels qu’ils sont aujourd’hui, demeurent peu séduisants. Je rappelle qu’un enseignant assistant touche le même salaire qu’un ingénieur qui n’a étudié que durant cinq ans.

Recueillis par A. M.
 








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