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Prix des carburants : Les professionnels de la pêche côtière n’arrivent plus à tenir la barre


Rédigé par Omar ASSIF Lundi 28 Novembre 2022

Partiellement à l’arrêt depuis plusieurs semaines, la flotte de la pêche côtière au Maroc vit une crise sans précédent, causée par les prix exorbitants du carburant et du matériel.



Prix des carburants : Les professionnels de la pêche côtière n’arrivent plus à tenir la barre
Rien ne va plus pour les professionnels des pêches côtière et artisanale. Dans les réseaux sociaux et sur certains sites de la presse électronique, il est même question d’une « grève ouverte » des pêcheurs qui appellent les décideurs à trouver des solutions à l’impact de la hausse des prix du carburant sur leur activité.

À ce jour, il reste toutefois difficile d’estimer le nombre exact des embarcations qui seraient ainsi à l’arrêt au niveau national. Divers intervenants s’accordent cependant sur le fait qu’un grand nombre de bateaux de la pêche côtière est immobilisé à cause de l’incapacité des pêcheurs à couvrir leurs frais. Si les difficultés vécues par le secteur de la pêche depuis l’explosion des prix du carburant sont connues depuis plusieurs mois déjà, les professionnels de pêche côtière et les chaînes de valeurs qui dépendent de leur activité semblent actuellement dans une impasse. Une situation qui perturbe le quotidien de milliers de familles qui vivent du secteur, mais qui impacte également les prix et disponibilité du poisson sur les marchés.

Pêche côtière

«Je pense que ce n’est pas une véritable grève, mais plutôt la difficulté de beaucoup de pêcheurs d’assurer le financement de leurs voyages de pêche. C’est une situation qui est surtout valable pour les professionnels de la pêche côtière, car leur activité nécessite de manoeuvrer en mer et, de ce fait, de consommer de grandes quantités de carburant comparativement à la pêche artisanale », nous explique Abdallah Blihi, président de la Confédération Nationale de la Pêche Artisanale au Maroc.

Selon un communiqué de la Chambre des pêches maritimes de la Méditerranée, relayé par « Libération », le taux d’arrêt en Méditerranée aurait atteint les 100% dans la région orientale et entre 70% à 80% dans les autres zones. La même source précise que les chalutiers sont les premiers concernés. Si les prix du carburant ont augmenté depuis plusieurs mois déjà, le timing de la congestion que vit actuellement le secteur s’explique également par l’accumulation des pertes et par l’augmentation des prix du matériel de pêche.

Sardiniers en grève

Sur la façade atlantique, à Larache, réputée pour son port et son importante activité de pêche, un communiqué conjoint d’une dizaine d’associations locales de la pêche côtière avait également annoncé le prolongement de l’arrêt de l’activité des bateaux jusqu’au 24 novembre 2022.

Le document en question précise que la situation intenable a obligé les sardiniers à limiter le nombre des sorties en mer par semaine puis à arrêter leurs activités depuis le 11 novembre 2022. Les professionnels de la pêche côtière à Larache demandent ainsi dans leur communiqué (dont « L’Opinion » détient une copie) que la zone de pêche Nord soit considérée comme « sinistrée ». Ils implorent par ailleurs le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour « plafonner les prix du carburant destiné au secteur de la pêche ». D’autres ports de la façade atlantique du Royaume vivent une situation équivalente, notamment celui de Tan-Tan où les associations locales de la pêche côtière ont annoncé que les professionnels avaient accumulé des crédits importants pour pouvoir s’approvisionner en carburant.

Promesse d’une éclaircie

Certains professionnels ont toutefois reçu des promesses concernant une diminution importante des prix du carburant destiné au secteur. Ainsi, dans un communiqué daté du 25 novembre 2022, les associations locales qui s’activent dans le port de Nador font référence à une réunion organisée (le même jour) avec les autorités locales, en précisant que « l’autorité territoriale et l’administration sectorielle ont promis que les prix des carburants connaîtront une baisse importante à partir du 1er décembre 2022 ».

De ce fait, les associations locales ont annoncé la reprise de l’activité de la pêche côtière à Nador dès le 26 novembre. « En plus de l’augmentation drastique des prix du carburant et du matériel, la pêche côtière et artisanale souffrent également de la raréfaction des ressources halieutiques. Je veux cependant préciser que le carburant utilisé par la pêche hauturière et côtière est subventionné alors que l’essence utilisée par la pêche artisanale implique encore 10% de TVA », conclut Abdallah Blihi, président de la Confédération Nationale de la Pêche Artisanale au Maroc. Affaire à suivre.



Omar ASSIF

Repères

Pêche durable au Maroc
Lors de la 45ème session de la Commission Générale de la Pêche en Méditerranée (CGPM), tenue à Tirana en Albanie, les efforts déployés par le Maroc en matière de pêche durable ont été mis en avant, sachant que le Royaume a reçu l’année dernière (au même titre que l’Union Européenne et la Turquie) le Prix de conformité de « catégorie 1 », pour son engagement à mettre en oeuvre toutes les décisions de la Commission Générale de la Pêche en Méditerranée, notamment celles relatives à la communication des données.
 
Dégâts de la pêche illicite
A l’occasion de la Journée internationale de la lutte contre la pêche illicite 2022, l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) a appelé à «une exploitation durable des océans, des mers et des ressources marines pour atténuer les pressions exercées sur les moyens d’existence et garantir la sécurité alimentaire ». A noter que la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) engendre la perte de 11 à 26 millions de tonnes de poisson chaque année, pour une valeur économique estimée de 10 à 23 milliards d’USD.

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Prix des carburants : Les professionnels de la pêche côtière n’arrivent plus à tenir la barre

Production halieutique


Vers une baisse de productivité de la pêche côtière et artisanale ?
 
L’année 2022 semble particulièrement difficile pour la chaîne de valeur liée à la pêche côtière. Selon l’Office National des Pêches (ONP), l’année 2021 avait pourtant enregistré un taux de progression de 32% de la valeur des produits de la pêche côtière et artisanale commercialisés au niveau des halles, des Comptoirs d’Agréage du Poisson Industriel (CAPI) et marchés de gros, avec un chiffre d’affaires de 9,9 milliards de dirhams.

En termes de volumes, ces produits avaient enregistré une augmentation de 3% avec près de 1.523.219 tonnes. S’agissant du volume des produits commercialisés au niveau de la 1ère vente, il s’était élevé à 1.332.765 tonnes pour une valeur de 9,11 MMDH, enregistrant ainsi une croissance de 3% en volume et de 36% en valeur par rapport à 2020.

Cette hausse avait été principalement expliquée par l’effet de la reprise post-Covid et la valorisation importante du prix moyen de vente du poulpe (+52%). Cette performance a concerné les deux segments de pêche côtière et artisanale dont la valeur des ventes a progressé respectivement de 25% et 66%.
 

Maroc-UE


Fixation des conditions de l’exercice des activités de la pêche pour 2023
 
Le Royaume du Maroc et l’Union Européenne (UE) ont tenu, les 9 et 10 novembre 2022 à Rabat, la quatrième session de la Commission mixte prévue par l’Accord de coopération en matière de pêche durable. Les deux délégations se sont félicitées de la gestion rigoureuse de l’Accord de partenariat et de l’engagement conjoint à « trouver des solutions aux contraintes imprévues dans cette gestion qui leur ont été imposées par les différentes crises internationales actuelles », indique un communiqué conjoint des deux parties. Durant cet événement, les participants ont salué « la qualité exceptionnelle de l’exécution des projets financés par l’appui de l’Union Européenne ».

« Ces projets contribuent au développement et à la mise en oeuvre de la stratégie nationale de développement du secteur de la pêche et de l’aquaculture, notamment en matière de renforcement de la recherche halieutique, d’appui au développement de la pêche artisanale, de soutien au développement de l’aquaculture et d’amélioration des conditions de débarquement, de contrôle au port et de valorisation ».

Les scientifiques ont présenté les résultats de leurs travaux conjoints, afin de permettre aux deux parties d’assurer un suivi régulier de l’évolution de l’état des ressources et d’orienter la fixation des conditions de l’exercice des activités de la pêche au titre de l’année 2023. Les parties ont également examiné et validé le rapport sur la répartition géographique et sociale des tranches de l’accès et des redevances de la même année.

 

3 questions à Hassan Sentissi


« Une situation inquiétante qui ne manque pas d’impacter l’industrie de transformation des produits de la mer »
 
Président de la Fédération Nationale des Industries de Transformation et de Valorisation des produits de la Pêche au Maroc (FENIP), Hassan Sentissi répond à nos questions.


- L’arrêt partiel de l’activité des flottes de la pêche côtière impacte-t-il l’industrie nationale de transformation et de valorisation des produits de la mer ?


- C’est en effet une situation inquiétante qui ne manque pas d’impacter l’industrie de transformation et de valorisation des produits de la mer. Au vu du prix actuel du gasoil, les bateaux de pêche ne font pas de bénéfices, pire, ils ont des pertes. Cela implique bien évidemment une baisse des captures et, pour les membres de la FENIP, ça prend la forme d’une baisse en termes d’approvisionnement.


- Cette baisse d’approvisionnement risque-t-elle de porter un réel préjudice au secteur de transformation et de valorisation des produits de la mer ?

- C’est en effet le cas puisque plus de 80% de notre approvisionnement provient de la pêche côtière qui vit actuellement une situation difficile. Grâce à cette chaîne de valeur, nous exportons l’équivalent de 2.1 milliards de dollars chaque année. Or, le risque actuellement est que l’industrie de transformation des produits de la mer ne parvienne plus à honorer ses engagements vis-à-vis de ses clients.


- Est-ce que la problématique et la situation actuelles de la flotte de pêche côtière sont inédites ?

- Il y a un peu plus d’une trentaine d’années, nous avions eu une situation plus ou moins comparable. A l’époque, le gouvernement avait consenti à autoriser les opérateurs à importer une certaine quantité de gasoil à bas prix et sans taxes afin de pouvoir reprendre leurs activités. Ce genre de solution pourrait éventuellement être envisagé actuellement pour débloquer la situation à moyen terme en attendant la transition vers l’utilisation des énergies renouvelables dans les bateaux de la pêche côtière.



Recueillis par O. A.

 








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