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Prêt-à-porter : Derrière les prix exorbitants des franchises au Maroc [INTÉGRAL]


Rédigé par Yousra RHARDOUD Mardi 19 Décembre 2023

Dans le monde du shopping au Maroc, les étiquettes de prix sur les vêtements de marques internationales suscitent souvent des interrogations. Cet écart considérable avec les prix pratiqués à l'étranger s'explique par divers facteurs, allant des droits de douane aux coûts logistiques.



Les amateurs de shopping ont sûrement constaté que les franchises et de grandes enseignes de prêt-à-porter proposent souvent des prix sensiblement différents pour les mêmes articles entre le Maroc et l'étranger. Une veste Zara, coûtant 150 euros en Espagne, est vendue au Maroc pour environ 2000 dirhams, soit une différence de 500 dirhams. Chez Bershka en France, des baskets affichées à 70 euros sont vendues au Maroc au prix de 899 dirhams.
 
Le constat est similaire pour les marques turques telles que LC WAIKIKI, DEFACTO… Par exemple, si une pièce coûte 300 livres turques en Turquie, elle est vendue à 300 dirhams au Maroc, sachant que la livre turque équivaut à 0,35 dirhams marocains. De telles différences de prix sont difficilement justifiables pour les consommateurs marocains, d'autant plus que le pouvoir d'achat au Maroc est bien inférieur à celui de certains pays européens, par exemple.
 
Droits de douane
 
Selon les professionnels consultés par « L’Opinion », plusieurs éléments expliquent cet écart, parmi lesquels les coûts logistiques, le taux de change, le loyer, mais surtout les impôts. La grande majorité des produits exposés sont importés de pays comme la Chine, le Vietnam, le Cambodge…, et sont donc soumis à des droits de douanes très élevés.
 
Depuis 2012, les droits de douane étaient de 25% sur les importations de franchises. Mais pour encourager ses marques à se fournir localement, le gouvernement a décidé à partir de 2020 d’augmenter par deux fois les droits de douane, d’abord à 30%, puis à 40%. La plupart des franchises décideront d’impacter directement cette taxe sur les consommateurs, ce qui provoquera naturellement une baisse des ventes. Pour corriger le tir, la Loi des Finances 2024 va baisser ces droits de 40% à 30%.
 
L’autre élément qui entre en jeu est celui des quantités. Avec des réseaux de plusieurs centaines de magasins et des chiffres d’affaires importants, les marques de prêt-à-porter en Europe peuvent baisser les prix à des niveaux défiant toute concurrence en jouant sur les quantités vendues. Au Maroc, le marché reste étroit, ce qui ne permet pas d’amortir les coûts fixes. Cette situation limite la marge de manœuvre des franchises pour proposer des réductions significatives sur leurs produits, et limite ainsi leur compétitivité par rapport au marché européen.
 
Le cas Zara
 
Si cela explique les prix pour certaines marques, qu’en est-il pour des groupes comme Inditex (Zara, Massimo Dutti, Stradivarius, Bershka, Pull and Bear…) qui s’approvisionnent en grande partie chez les producteurs marocains de textile ? Selon Karim Tazi, fondateur des magasins de prêt-à-porter pour femmes Marwa, cela pourrait s’expliquer par le positionnement choisi par ces marques.
 
Les marques se répartissent entre le haut de gamme, le luxe, la moyenne gamme, le luxe accessible, et le grand public ou mass market. L'essentiel réside dans le fait que les marques de luxe sont synonymes de luxe, et le positionnement des prix, c'est-à-dire le prix de vente au consommateur, découle de ce positionnement”, nous explique-t-il.
 
Made in Morocco
 
Le secteur du prêt-à-porter au Maroc souffre d’un manque de concurrence. Malgré un secteur textile dynamique, très peu d’entrepreneurs ont lancé leurs propres marques Made In Morocco. En tant que huitième exportateur de produits textiles vers l'Europe, le Royaume a toutes les cartes en main pour réussir à jouer un rôle clé dans ce domaine, de la production à la commercialisation.
 
Les écarts de prix entre le Maroc et d'autres marchés offrent des opportunités significatives pour le développement du secteur textile national. Avec un soutien ciblé de la part de l’Etat, notre pays pourrait stimuler la création de nouvelles marques locales et encourager davantage d'entrepreneurs à investir dans le secteur.
 
Une plus grande concurrence bénéficierait aux consommateurs marocains en offrant des produits de qualité à des prix plus abordables tout en renforçant la position du Maroc sur la scène internationale de la mode. Le développement du secteur du prêt-à-porter marocain, en misant sur la qualité de la production locale et en favorisant l'innovation, pourrait également renforcer l'identité culturelle du pays en mettant en avant des créations uniques et originales.
 
 

3 questions à Karim Tazi : “Il est crucial de construire aujourd'hui des modèles plus intelligents”

Karim Tazi, PDG de l’enseigne marocaine leader de prêt-à-porter pour femmes Marwa, a répondu à nos questions.
Karim Tazi, PDG de l’enseigne marocaine leader de prêt-à-porter pour femmes Marwa, a répondu à nos questions.
  • Quelles sont les principales raisons expliquant les écarts de prix entre les marques de prêt-à-porter au Maroc et en Europe ?
 
À mon avis, les divergences ne sont pas simplement liées à l'origine géographique des produits ou aux prix pratiqués au Maroc comparés à ceux en Europe, mais plutôt à différents positionnements sur le marché.
 
Les marques se répartissent entre le haut de gamme, le luxe, la moyenne gamme, le luxe accessible, et le grand public ou mass market. L'essentiel réside dans le fait que les marques de luxe sont synonymes de luxe, et le positionnement des prix, c'est-à-dire le prix de vente au consommateur, découle de ce positionnement.
 
Il s'agit de choisir entre le haut de gamme avec des finitions, des matières et un marketing justifiant des prix élevés, la moyenne gamme ou le mass market, mettant l'accent sur le prix, la qualité et le confort. Le confort peut ainsi primer sur d'autres critères.
 
En ce qui concerne la production, le Maroc demeure un pays compétitif, bien que ses coûts salariaux ne puissent rivaliser avec ceux de nations aux salaires très bas, comme le Bangladesh ou le Myanmar, ou avec celles qui subventionnent leurs producteurs.
 
  • Comment expliquer les différences de prix pour une marque comme Zara, qui s'approvisionne au Maroc ?
 
Concernant les différences de prix au sein d'une même marque entre l'Europe et le Maroc, notamment le cas de Zara, cela nécessite une clarification de la part de la marque.
 
Le Maroc étant un acteur majeur dans la production textile avec près de 200.000 emplois dans le secteur, on met des protections, des barrières tarifaires et non tarifaires pour protéger l'industrie locale. À mon avis, concernant Zara, c’est un client très important du Maroc. Il est légitime de s'interroger sur les avantages dont bénéficie Zara par rapport à d'autres marques marocaines.
 
 
  • Quelles stratégies préconisez-vous pour maximiser les avantages économiques du textile marocain ?
Je suis d'avis que le modèle d'industrie textile traditionnel, basé sur des pratiques obsolètes, montre ses limites et doit évoluer. Il est crucial de construire aujourd'hui des modèles plus intelligents, axés sur l'innovation et la durabilité.
 
Cette transition vers des pratiques plus responsables dans l'industrie textile représente une nouvelle ère à laquelle le Maroc peut activement participer. Cela nécessitera le renforcement de l'information et de l'expertise pour jouer un rôle central dans la nouvelle dynamique du secteur, propulsant ainsi le Maroc vers un avenir textile plus moderne et durable.
 

AMITH : Des objectifs ambitieux

Anass El Ansari et Omar Sajid, à la tête de l'AMITH, ont entrepris de consolider le secteur industriel pour les  années  2022 à 2025. Leur programme, structuré autour de six axes, vise en premier lieu à soutenir la souveraineté industrielle du Maroc. Cela implique la réduction de la dépendance aux importations textiles tout en stimulant les exportations.
 
Parallèlement, ils se sont engagés à promouvoir la création d'emplois dans le secteur, à encourager la formation et le développement des compétences, tout en favorisant l'industrialisation et l'intégration du secteur.
 
En outre, le programme s'attache à faciliter l'implantation et la régionalisation du secteur, notamment dans les provinces du Sud marocain. Cette approche globale traduit la volonté du binôme de revitaliser et de renforcer le secteur textile et habillement, positionnant ainsi l'AMITH comme un acteur majeur dans la promotion du développement industriel durable au Maroc.
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Textile : Un secteur locomotive

Dans ce panorama des chiffres clés du secteur textile au Maroc, une série d'indicateurs met en lumière l'importance économique et sociale de cette industrie au sein du pays. Le secteur textile au Maroc se distingue par sa diversité, comptant pas moins de 1.630 entreprises. Cette pluralité d'acteurs contribue de manière significative à la vitalité et à la robustesse de l'économie nationale.
 
Avec une main-d'œuvre forte de près de 200.000 employés, le secteur textile représente une part considérable de l'emploi total au Maroc, atteignant 22% dans l'industrie. L'industrie textile se positionne comme un pilier de l'économie nationale, contribuant à hauteur de 15% au Produit Intérieur Brut (PIB) industriel.
 
Sur la scène internationale, les produits textiles marocains jouissent d'une renommée appréciable, représentant 11% des exportations du pays. Le Maroc affirme sa position en tant que huitième exportateur vers l'Union Européenne, consolidant ainsi ses liens commerciaux avec ce marché important.
 
Une croissance exceptionnelle, témoignant d'une compétitivité accrue, s'observe avec une hausse remarquable de 24,43% des exportations textiles vers l'Union Européenne au cours de l'année 2022.
 
Enfin, le secteur textile s'impose comme un employeur majeur, mobilisant 12% de la population active. Cette statistique souligne l'importance capitale de l'industrie textile pour l'emploi national et son rôle crucial dans le tissu socio-économique du Maroc.








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