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Marché des pierres précieuses : Une riche mine d’opportunités sous explorée et peu exploitée dans le Royaume


Rédigé par Houda BELABD Mercredi 30 Novembre 2022

De par sa géologie, le Maroc est richissime en cristaux et en minéraux. Son Haut et son Moyen Atlas en regorgent à souhait et ses carrières de barytine, améthyste, malachite, fluorine, aragonite ou jadéite l’ont, depuis la nuit des temps, fait connaître en tant que niche à gemmes.



Pierre brute naturelle malachite verte soyeuse.
Pierre brute naturelle malachite verte soyeuse.
Des fouilles sur sites, livres et documentaires en disent long sur les opulences naturelles qui ont inscrit le Royaume dans les annales des eldorados des pierres précieuses aux valeurs inestimables. Des fouilles qui témoignent de moult traces inaltérables d’un passé lointain. Si Tazouta, une commune de Sefrou, est mondialement connue pour sa carrière d’aragonites, Irhoud en charme plus d’un par sa carrière de barytine. Sidi Rahal, pour sa part, regorge d’améthystes. Mais au commencement fut la passion: la rencontre entre minéraux et mineurs s’est toujours faite avec amour et tant de géologues et gemmologues d’ici et d’ailleurs ont dédié des années de recherche à ces pierres aux symboliques légendaires.

Tazouta, terre d’aragonite

A quelques kilomètres de Sefrou, plus exactement à Tazouta, une carrière d’aragonite attire, bon an, mal an, d’innombrables groupes de gemmologues et d’archéologues en quête de ce graal dont le prix du gramme dépasse toutes les estimations. Etymologiquement, l’aragonite doit son nom à une famille noble espagnole appelée de Molina de Aragon qui a, à son tour, donné son nom à une localité se situant à la communauté autonome de Castille-La Manche, classée par l’UNESCO en tant que plus beau gisement d’aragonite au monde.

De Tazouta, aussi, proviennent ces rarissimes cristaux qui constituent le squelette calcaire de nombreux organismes marins vivants et se déclinent en de nombreux spécimens. De plus, il s’agit d’une espèce polymorphe de carbonate et de calcium, ses cristaux en prismes allongés se forment en agrégats dans les gîtes sédimentaires et les basaltes. Sa dureté est de 3,5 à 4 sur l’échelle de Mohs et sa densité varie de 2,9 à 3. Penser que les gemmes restent l’apanage des «happy few », de la jeunesse dorée et de la haute société serait, selon des experts, mal connaître ce marché.

Pour un gemmologue tenancier d’une enseigne marocaine pionnière dans le secteur, exerçant depuis plus d’un siècle à Casablanca, Rabat et Tanger : «Les pierres précieuses ne sont plus l’apanage de la classe riche du Maroc. Beaucoup de femmes appartenant à la classe moyenne, voire un peu plus en-deçà, c’est-à-dire les femmes indépendantes financièrement qui peuvent générer un gain annuel d’une centaine de milliers de dirhams, peuvent s’en procurer, même irrégulièrement, même avec parcimonie». Ce spécialiste nous apprend que dans sa boutique casablancaise, le prix moyen d’un bijou de qualité avoisine les 100.000 dhs, sachant que le prix du synthétique démarre au dixième de cette même somme.

Selon notre source : «Le diamant de laboratoire ou de culture, mieux connu sous le nom de diamant synthétique, c’est-à-dire représentant des imperfections une fois passé sous la loupe, vaut à partir de 10.000 dhs le gramme, le carat. Le diamant pur, c’est-à- dire celui où l’oeil de l’expert ne décèle aucun défaut avec un grossissement de dix fois, vaut à partir de 55.000 dhs. Sur une bague ou un bijou en or pur, les deux valent davantage ».

Seulement voilà, force est de s’interroger sur ce que dit la réglementation en matière de contrat de vente et d’authentification de ces joyaux qui valent des fortunes.

«Le secteur du luxe français oeuvrant au Maroc est essentiellement régi par la réglementation française. Le décret n°2002-65 du 14 janvier 2002 relatif au commerce des pierres, gemmes et des perles mentionne dans son article n°5 que l’emploi des termes : «semi-précieux » et «semi-fins» est interdit pour désigner toutes les matières et produits mentionnés à l’article 1er », poursuit-il

Dans le même code, l’article 1er fait mention des pierres formées dans des gîtes naturels, celles synthétiques, artificielles et imitations de pierres gemmes, mais aussi des matières organiques d’origine végétale ou animale, traditionnellement utilisées en joaillerie, voire des perles blanches et perles de culture.

En termes moins techniques, est considérée pierre précieuse toute pierre rare, raffinée, pure et, surtout, ne représentant aucune imperfection au réfractomètre, à la loupe ou aux rayons UV. Soit les trois paramètres qui jugent de l’authenticité d’une pierre précieuse en règle absolue, comme nous le fait remarquer notre gemmologue.

«Dans l’absence d’une réglementation marocaine gérant ce secteur, le client doit exiger un contrat d’authenticité et un contrat de vente à son diamantaire ou joaillier, comme cela se fait automatiquement et obligatoirement en France ou en Belgique, par exemple. Car c’est la seule et unique chose qui peut lui garantir le sérieux de l’enseigne », continue notre source qui requiert l’anonymat dans un pur souci de concurrence loyale avant de conclure que la seule réglementation qui fait loi dans ce secteur, c’est la traque aux contrefaçons relevant directement du régime douanier marocain.



Houda BELABD

3 questions à Hugues Renouf-Mounier


« La diversité des formes, des modèles et des symboles témoignent d’un brassage millénaire »
 
Associé gérant de Mounier & Bouvard et fin connaisseur du marché de la haute joaillerie, Hugues Renouf-Mounier a répondu à nos questions.
 
- Quelles sont les particularités du marché de la haute joaillerie au Maroc ?

- Le marché de la bijouterie-joaillerie au Maroc est caractérisé, d’une part, par la présence emblématique de la bijouterie traditionnelle marocaine reconnaissable par des gravures issues de techniques ancestrales et une utilisation de pierres précieuses ou ornementales. Et d’autre part la joaillerie classique comme les articles de mariages ou des pièces inspirées des arts traditionnels marocains.

Depuis plusieurs années, tradition et modernité se côtoient sur ce marché. Les tendances évoluent mais l’héritage artistique et culturel reste fortement ancré dans les créations. Chez Mounier & Bouvard, notre challenge permanent est de perpétuer cet héritage à travers nos créations. Nous veillons à préserver ce patrimoine, tout en innovant et en nous adaptant aux changements de la société d’aujourd’hui et aux goûts de notre clientèle.


- A quel point pourrions-nous espérer que la haute joaillerie marocaine puisse être représentative de l’artisanat local comme c’est le cas de la maroquinerie, par exemple ?

- Elle l’est déjà. La bijouterie traditionnelle marocaine fait partie des arts reconnus par le ministère du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie Sociale et Solidaire-Maison de l’Artisan. Les bijoux traditionnels marocains sont façonnés à la main par des artisans qualifiés qui bénéficient de nombreuses années d’expérience et utilisent des outils traditionnels et des techniques ancestrales. La diversité des formes, des modèles et des symboles témoignent d’un brassage millénaire des différentes civilisations qui se sont succédé dans le Royaume. Et illustre parfaitement le talent et le savoir-faire remarquable de l’artisan marocain.


- Qu’est-ce qui vous donne le droit de vous considérer comme marque de haute joaillerie ?

- Depuis 2019, nos créations sont reconnues par le Label National de l’Artisanat du Maroc - Morocco Handmade - délivré par le ministère du Tourisme, de l’Artisanat, de l’Economie Sociale et Solidaire (Direction de la Préservation du Patrimoine, de l’Innovation et de la Promotion) qui atteste que nos bijoux sont entièrement fabriqués à la main par des artisans marocains.



Recueillis par H. B.

 

Qualité


Quid du diamant synthétique ?
 
Un diamant synthétique, également appelé diamant de synthèse, diamant de laboratoire ou diamant de culture, est obtenu par divers procédés physiques et chimiques, dont le but est de reproduire la structure des diamants naturels. Comment est-ce possible ? La molécule du diamant pur n’est plus un secret depuis bien longtemps… Seulement voilà, la qualité de ces diamants synthétiques, qui sont utilisés dans l’industrie, peut varier du plus au moins présentable.

Selon plusieurs témoignages, le marché des diamants synthétiques est en pleine croissance, en particulier dans les entreprises de joaillerie, d’électronique et de haute technologie, qui requièrent une qualité élevée et une forte teneur en matières premières.

Outre nos frontières, par exemple en France, le marché des diamants cultivés en laboratoire est passé de 1% du marché du diamant brut valant un pactole de 14 milliards d’euros en 2016 à environ 2 à 3% en 2019... Nous vous laissons faire le calcul.
 

Distinction


Trier le vrai du faux
 
Peu ou prou, 4000 sortes de pierres gisent dans les entrailles de la Mère nature et il existe des techniques permettant de trier le vrai du faux, en termes de gemmes. Par exemple, un vrai rubis brille d’un magnifique éclat rouge vif, un peu à la manière d’un feu rouge au clair du jour. Un faux rubis est souvent terne, ce qui peut être repéré à l’oeil nu. De plus, tous les gemmologues, géologues et physiciens s’accordent à dire que ces pierres sont claires, mais ne brillent pas. Si la pierre est d’un rouge foncé, il se peut que ce ne soit pas un rubis mais un grenat. Aussi, les vrais rubis sont-ils extrêmement durs. Le test d’authentification recommandé par les joailliers est d’essayer de rayer une de ces pierres avec une pièce de monnaie. Si l’on y arrive, c’est qu’il s’agit d’une fallacieuse.

En effet, seul un diamant peut rayer un rubis. La vanadinite, quant à elle, varie du jaune au brun, en passant par l’orange et parfois même le rouge comme celle dont regorge la Moulaya et Aouli près de Midelt, mais jamais violette terne comme l’on peut en rencontrer dans le marché de la contrefaçon. La barytine d’Irhoud au Maroc est tantôt blanche, tantôt grisâtre et est reconnue grâce à sa forme de cristal aplati.

Chez les diamantaires, un certificat d’authenticité ne peut être délivré que par l’un des 3 laboratoires les plus éminents à l’échelle mondiale, soit GIA (Gemologica linstitute of America), HRD (Hoge Raadvoor Diamant) et IGI (International Gemological Institute). Ce sont, ici, des systèmes qui détiennent le monopole des standards permettant l’évaluation des diamants et sont essentiellement délivrés par les Etats-Unis, l’Inde, Israël et la Belgique.

 

Douanes


Délai supplémentaire
 
Conformément à un avis de l’administration des douanes et droits indirects aux commerçants et négociants en métaux précieux, pierres précieuses, objets d’art et antiquités, le délai d’enregistrement auprès des bureaux de douane, y compris ceux de la garantie, initialement fixé au 4 novembre 2022, est exceptionnellement prolongé jusqu’au 31 décembre 2022. Ce délai supplémentaire est octroyé par les services douaniers pour donner la possibilité à tous les assujettis d’accomplir les formalités correspondantes, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi n° 12.18 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

La loi n° 12-18 modifiant et complétant le code pénal marocain ainsi que la loi n° 43-05 relative à la lutte contre le blanchiment d’argent ont été publiées au Bulletin Officiel du Royaume du Maroc n° 7018, à savoir celui du 2 septembre 2021, dans son édition de traduction officielle.