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Interview avec Kenza Sekkat : « Les diabétiques doivent adapter les aliments de rupture du jeûne »


Rédigé par Safaa KSAANI Mardi 11 Avril 2023

La question du jeûne pour un patient diabétique reste une décision qui se pose chaque année. En cas de jeûne, certains patients s’adonnent à un régime alimentaire « aléatoire ». Dr Kenza Sekkat, endocrinologue, fait la part des choses et nous éclaire sur les possibilités, les limites et les contraintes d'une telle ligne de conduite.



-Pendant Ramadan, les patients diabétiques s’adonnent à un régime alimentaire « aléatoire » en décrétant de se priver volontairement de certains aliments ou en mangeant excessivement certains autres. Quels risques encourent-ils, au-delà des risques de complications hypo ou hyperglycémiques ?

-Il est primordial durant le mois de Ramadan de garder une alimentation équilibrée entre le Ftour et le Souhour en faisant en sorte d’y inclure tous les groupes alimentaires sans omettre certains aliments qu’on a tendance à oublier durant ce mois sacré, notamment les légumes, les crudités, les bonnes protéines et les bonnes graisses.
Une alimentation équilibrée permettra d’éviter certains risques liés au jeûne tels que l’hypoglycémie, l’hyperglycémie, la déshydratation et la prise de poids.

-Que dire des repas pour le diabétique pendant le Ramadan ? Faudrait-il privilégier un repas copieux ou plusieurs repas de petites portions de nourriture ?

-Il est connu que les habitudes alimentaires au cours de Ramadan changent d’une manière très importante, le repas du Ftour est particulièrement copieux avec de très grandes quantités de glucides à index glycémique élevé et d’aliments gras (friture des aliments et consommation d’acides gras trans et de graisses saturées). Aussi, les tables marocaines du Ftour sont très souvent pauvres en légumes, crudités et protéines. La faim pendant la journée fait que la vitesse de consommation est très rapide, ce qui conduit le plus souvent à trop manger.

Tout ceci conduit à l’augmentation des chiffres glycémiques et à des problèmes de digestion.
Il est recommandé de répartir équitablement ces apports caloriques sur trois repas de préférence (Ftour, dîner et Souhour) tout en évitant de grignoter entre chaque repas. Les apports énergétiques à chaque repas devraient contenir les trois macronutriments : glucides à bas index glycémiques, protides et lipides.

-Les dattes, aliment incontournable de la table pour la rupture du jeûne, sont déconseillées à ces personnes. Combien et comment peuvent-elles en consommer ?

-Il est important pour les patients diabétiques d’adapter les aliments de la rupture du jeûne au taux de sucre dans le sang réalisé dans le cadre de la surveillance glycémique. Si la glycémie le permet, deux à trois dattes avec un verre d’eau sont autorisées pour rompre le jeûne ou une datte avec un verre de lait.

-En termes d’énergie, est-il vrai que le taux des glucides doit être moins important que les lipides et les protéines ?

-Un apport alimentaire journalier équilibré devrait être réparti comme suit : 45 à 50% de glucides à bas index glycémique en évitant les sucres rapides, 20 à 30% de protéines animales ou végétales et <35% de lipides tout en évitant les acides gras saturés et trans, notamment les fritures.

-Le jeûne permet-il réellement aux diabétiques de perdre du poids ?

-Pas nécessairement, surtout si les habitudes alimentaires ne sont pas adaptées, notamment quand la personne consomme de grandes quantités de glucides à index glycémique élevé au Ftour et au Souhour, et une utilisation excessive d’acides gras trans et de graisses saturées avec une réduction de l’activité physique et une modification des habitudes de sommeil…
Tout ceci pourrait conduire à une augmentation de l’apport calorique avec une diminution de la dépense énergétique et donc une prise de poids.

b[- Est-il vrai que l’activité physique est à proscrire pendant le Ramadan ?
]b
- Si l’activité physique est régulière et modérée avant le Ramadan, elle sera à maintenir. Si elle est importante, elle sera à éviter surtout l’après-midi avant le Ftour, car c’est à ce moment que le plus haut risque d’hypoglycémie a lieu, et plus de risque de déshydratation et d’hyperviscosité sanguine est encouru, d’où le risque de thrombose.
L’activité est à recommander après la rupture du jeûne dans la soirée. La récitation de l’ensemble des prières des Tarawih est considérée comme faisant partie intégrante du programme d’activité physique quotidien. Pour la faire en toute sécurité, il est conseillé d’emmener avec soi trois éléments : une bouteille d’eau pour s’hydrater tout au long de la période de la prière, un appareil de mesure de la glycémie s’il y a sensation d’hypoglycémie et un moyen de se resucrer en cas d’hypoglycémie.