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Inscription de la Tbourida à l’UNESCO : Salve triomphale du Royaume sur le champ patrimonial


Rédigé par Oussama ABAOUSS Vendredi 17 Décembre 2021

Les arts de Tbourida du Maroc ont été officiellement classés en tant que patrimoine culturel immatériel de l’Humanité de l’UNESCO, mercredi dernier à Paris.



Premier Prix international CHEIKH MANSOUR IBN ZAYED (EAU), illustrant une Sorba du Sahara marocain. (Ph : Darem BOUCHENTOUF)
Premier Prix international CHEIKH MANSOUR IBN ZAYED (EAU), illustrant une Sorba du Sahara marocain. (Ph : Darem BOUCHENTOUF)
C’est fait, les arts de la Tbourida marocaine ont officiellement été inscrits dans la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité de l’UNESCO. L’inscription de cet art ancestral s’est faite mercredi dernier, à Paris, lors de la réunion de la 16ème session du Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.

L’Organe d’évaluation des candidatures a annoncé à cette occasion que la proposition d’inscription soumise par le Maroc « satisfait » aux cinq critères requis par le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. La présidente de l’Organe d’évaluation a par ailleurs souligné que la Tbourida a une « importance pour l’identité culturelle et la mémoire collective du Maroc et de ses communautés, et contribue au développement durable par le biais de l’élevage des chevaux et la fabrication de vêtements et de selles à partir de matériaux locaux ».

Reconnaissance internationale

L’inscription de cette expression artistique sur la Liste de l’UNESCO témoigne de l’importance de ce legs profondément enraciné dans la conscience collective des Marocains et de leur Histoire plurimillénaire. Réagissant à cette consécration, la Délégation Permanente du Royaume du Maroc auprès de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO), représentée par l’ambassadeur Samir Addahre, s’est félicitée de cette inscription qui constitue « une reconnaissance internationale d’un héritage civilisationnel arabo-amazigh unique au monde et auquel les Marocains sont très attachés ».

La Fédération Royale Marocaine des Sports Equestres (FRMSE) et la Société Royale d’Encouragement du Cheval (SOREC) se sont également félicitées de cette reconnaissance mondiale de la Tbourida évoquant « un honneur pour toutes les parties prenantes de la filière équine marocaine qui ont contribué à transmettre la valeur universelle de cet art équestre ».

Un art équestre multi-centenaire

Sur le site web de l’UNESCO, la Tbourida marocaine est décrite comme une représentation équestre apparue au XVIème siècle qui « simule une succession de parades militaires, reconstituées selon les conventions et rituels arabo-amazighs ancestraux. Chaque parade de Tbourida est effectuée par une troupe constituée d’un nombre impair de cavaliers et de chevaux (de 15 à 25), alignés côte à côte et au milieu desquels se place le chef de la troupe. Souvent, avant l’événement, les cavaliers donnent à leur prestation une portée spirituelle, effectuant leurs ablutions puis priant collectivement. Ensemble, sous la direction du chef, cavaliers et chevaux exécutent une parade composée de deux parties principales.

La première est la hadda, ou le salut de la troupe, qui entre au trot en piste et réalise un maniement d’armes acrobatique, puis se repositionne à son point de départ. La deuxième est la talqa, où les troupes repartent au galop et effectuent un tir au fusil, à blanc, avant de se retirer, simulant un départ collectif à la guerre.

Le fruit d’un élan collectif

La page consacrée à la Tbourida sur le site de l’UNESCO décrit également les caractères spécifiques de la Tbourida marocaine. « Les cavaliers portent des costumes et des accessoires d’époque incluant notamment un turban, des vêtements drapés, des babouches, un petit livret du Coran et une épée arabe ancienne. Les chevaux, eux, sont harnachés avec du matériel cousu et décoré de manière traditionnelle. Les cavaliers sont issus d’une même tribu ou d’une même région dont ils représentent les coutumes et les costumes. La transmission se fait de génération en génération au sein des familles, par la tradition orale et l’observation des pratiquants ».

À noter que cette mise à l’honneur mondiale de la Tbourida est le fruit du travail collectif du ministère de la Culture, de la Jeunesse et de la Communication, la Délégation Permanente du Royaume du Maroc auprès de l’UNESCO, la Fédération Royale Marocaine des Sports Equestres et la Société Royale d’Encouragement du Cheval.


Oussama ABAOUSS

Repères

Les femmes, les jeunes et la Tbourida
La Tbourida est un art ancestral qui n’est plus le privilège des hommes adultes. Actuellement, il existe près de 25 troupes de jeunes cavaliers (11 à 16 ans), provenant de toutes les régions du Maroc, qui participent au championnat annuel. Chaque concours officiel de Tbourida s’ouvre par des prestations réalisées par ces troupes de jeunes. Les femmes ne sont pas en reste puisqu’elles participent aussi aux représentations de Tbourida. On compte actuellement 10 troupes féminines au niveau national.
 
Tbourida et développement
La Tbourida est à l’origine du développement du marché des chevaux de races Barbe et Arabe-Barbe, qui représentent à elles deux environ 80% du cheptel marocain. La Tbourida est le débouché principal de cette production équine. Cet art permet également de développer une économie locale, basée sur un développement social et solidaire. En effet, l’habillement des hommes et le harnachement des chevaux sont généralement conçus et fabriqués à partir de matériaux locaux (textile, cuir, ferronnerie).

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Inscription de la Tbourida à l’UNESCO : Salve triomphale du Royaume sur le champ patrimonial

Communauté


Un art équestre ancestral enraciné dans l’identité et les traditions tribales
 
Les communautés, les groupes et les individus concernés par la Tbourida au Maroc sont, en premier lieu, les tribus du monde rural marocain. En effet, chaque tribu compte une ou plusieurs troupes de Tbourida avec une concentration significative dans les régions de Tadla, Doukkala- Abda, Bni-Amir, Charquaoua, Lahmar, Rhamna, Bni-Ouarayn, Zemmour-Zair, Zayane et Bni Yznassen.

On dénombre près d’un millier de troupes dans tout le Maroc. Elles réalisent des spectacles pour animer les moussems et sont 330 à participer officiellement à un championnat national annuel, composé de concours régionaux, inter-régionaux et d’une finale nationale.

Les groupes et les individus concernés par la Tbourida comprennent également les éleveurs et les producteurs de chevaux de race Barbe et Arabe-Barbe,les artisans et les spécialistes de la santé et du soin du cheval (vétérinaires, maréchaux- ferrants, palefreniers, etc.). La Tbourida revêt à cet égard un intérêt socioéconomique qui s’ajoute à sa valeur patrimoniale.
 

Réseaux sociaux


Enième débat sur la « propriété » d’un patrimoine ancestral
 
Avant même que l’UNESCO ait accepté la demande du Maroc pour inscrire la Tbourida en tant que patrimoine mondial, des débats et polémiques sont apparus sur les réseaux sociaux autour de la légitimité de l’inscription de cet art sous l’égide du Royaume.

À l’instar du Couscous ou du Caftan, certaines voix, principalement en Algérie, se sont élevées pour affirmer que ce patrimoine n’est pas uniquement marocain. Or, l’inscription de cet art ancestral dans la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité de l’UNESCO ne signifie en aucun cas que la Tbourida se pratique uniquement au Maroc.

D’ailleurs, le dossier de candidature du Maroc, téléchargeable sur le site de l’UNESCO, précise que « la Tbourida est un héritage du monde arabo-amazigh. Son berceau s’étend de la Mauritanie à la Tunisie. La localisation géographique correspond aux territoires géographiques des tribus. Au Maroc, il s’agit des régions rurales de toutes les provinces du pays ».

Les connaisseurs de la Tbourida marocaine pointent cependant un haut degré de sauvegarde des traditions de cet art au Maroc comparativement avec d’autres pays de la région où l’équivalent de la Tbourida se fait (entre autres) avec des fusils modernes.

« Les historiens et spécialistes de la Tbourida affirment que cet art a commencé au Maroc à l’époque du Sultan Moulay Ismaïl. Cela dit, l’UNESCO a accepté d’inscrire la Tbourida marocaine, car sa pratique se fait encore dans le respect des traditions ancestrales », souligne Omar Skalli, DG de la SOREC.
 

3 questions à Omar Skalli, DG de la SOREC

Inscription de la Tbourida à l’UNESCO : Salve triomphale du Royaume sur le champ patrimonial

« La perspective d’avenir peut prendre la forme d’une meilleure promotion nationale et internationale et une meilleure organisation des fêtes de Tbourida »

 
Directeur général de la Société Royale d’Encouragement du Cheval (SOREC), Omar Skalli répond à nos questions sur l’inscription de la Tbourida en tant que patrimoine mondial de l’UNESCO.


- Que représente l’inscription de la Tbourida en tant que patrimoine mondial de l’UNESCO ?

- -L’inscription de cet art ancestral national - auquel les Marocains sont particulièrement attachés - en tant que patrimoine mondial de l’UNESCO, est une consécration qui, au-delà de la pratique équestre, honore également les autres arts, musiques et artisanats qui sont indissociables de la Tbourida. Cette reconnaissance mondiale de la valeur patrimoniale de la Tbourida est également une incitation à sauvegarder cet art et à en perpétuer l’authenticité et les valeurs.


- Quelle est la particularité de la Tbourida marocaine ?

- Si on compare cet art, tel qu’il se pratique dans le Royaume, à d’autres activités plus ou moins comparables dans d’autres pays de la région, il est évident que les traditions de la Tbourida marocaine ont été maintenues en l’état. Les fusils qui sont utilisés sont des fusils de l’époque. Même chose pour les harnachements des chevaux et les habits des cavaliers. Les chevaux utilisés sont également issus de races chevalines marocaines (Barbe et Arabe-Barbes).

C’est un art qui se transmet de génération en génération, qui a gardé son authenticité, et qui n’est pas localisé dans un seul territoire puisqu’il se pratique selon des manières qui peuvent différer d’une région à l’autre dans le pays. L’autre particularité de la Tbourida du Maroc, c’est son lien avec le monde agricole : les fêtes deTbourida ont lieu pendant les moussems, ce qui correspond à des moments clés de la saison agricole.


- Quelle est votre perspective par rapport à l’avenir de la Tbourida au Maroc ?

- Comme je l’ai déjà mentionné, la pratique de la Tbourida s’accompagne de plusieurs autres arts « connexes » comme l’artisanat associé à la confection des harnachements, selles, habits, mais également les musiques et les produits de terroir. La perspective d’avenir peut prendre la forme d’une meilleure promotion nationale et internationale et une meilleure organisation des fêtes de Tbourida. L’objectif serait d’améliorer encore plus le potentiel socioéconomique de cet art tout en sauvegardant l’authenticité de la Tbourida pour qu’elle puisse se perpétuer telle qu’elle nous a été léguée par nos ancêtres.

 
Recueillis par O. A.
 








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