
Le Maroc figure à la 107ème position du « Classement mondial de la démocratie 2025 », publié par l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA), sur un total de 173 pays. Ce rapport, reconnu comme une référence internationale et disposant du statut d’observateur permanent auprès des Nations Unies, attribue au Royaume un score global de 0,531 sur 1, un indice qui mesure le niveau démocratique selon une échelle où la valeur maximale reflète la meilleure performance.
L’évaluation du Maroc révèle des performances nuancées. Le Royaume obtient son meilleur résultat dans le domaine des droits, où il se classe au 77ème rang mondial avec un score de 0,509. Sur le plan de la participation politique, il atteint la 96ème place, avec un score identique à son indice global (0,531). En revanche, deux autres dimensions affichent des résultats plus préoccupants, la représentation politique et l’État de droit. Dans ces deux catégories, le Maroc n’occupe que la 107ème place, avec respectivement 0,432 et 0,396.
Cette disparité reflète une situation hybride : certaines dimensions de la démocratie connaissent une amélioration, tandis que d’autres peinent à progresser, voire montrent des signes de stagnation.
Positionnement régional et comparaisons
À l’échelle africaine, le Maroc occupe le 19ème rang. Le classement continental est dominé par le Cap-Vert (34ème mondial), l’Afrique du Sud (43ème) et le Ghana (48ème). Dans le monde arabe, le Royaume arrive au 4ème rang derrière l’Irak (97ème mondial), la Jordanie (102ème) et le Liban (105ème). Par rapport aux pays du Maghreb, il conserve la première place, devant la Tunisie (112ème), la Mauritanie (114ème), l’Algérie (117ème) et la Libye (151ème).
Ce positionnement met en évidence une relative avance du Maroc sur ses voisins maghrébins, mais aussi ses limites au regard d’autres pays africains qui enregistrent de meilleures performances démocratiques.
Écarts entre participation et représentation
Le rapport attire l’attention sur l’écart existant entre le niveau de participation politique et celui de la représentation effective. Alors que le Maroc obtient un score de 0,531 en matière de participation, traduisant l’existence de canaux de participation citoyenne et d’élections régulières, le score chute à 0,432 pour la représentativité politique. Autrement dit, la mobilisation électorale et les mécanismes participatifs ne se traduisent pas encore par une efficacité et une crédibilité suffisantes des institutions élues.
Cet écart traduit un déséquilibre : d’un côté, une ouverture permettant aux citoyens d’exprimer leur choix ; de l’autre, une difficulté à transformer cette participation en institutions représentatives fortes, transparentes et pleinement légitimes.
L’indice de l’État de droit (0,396) souligne les défis structurels auxquels le Maroc reste confronté. Les enjeux concernent l’indépendance du pouvoir judiciaire, les garanties offertes aux justiciables, l’égalité de traitement devant la justice et l’efficacité du système judiciaire. Malgré des réformes engagées pour renforcer l’autonomie de la justice et l’émanciper de l’Exécutif et du législatif, les résultats montrent que la perception et l’application de ces réformes ne traduisent pas encore un niveau satisfaisant.
Les droits : Des avancées mais une image fragilisée
Sur l’indice des droits, le Maroc enregistre un score de 0,509. Ce résultat témoigne de progrès notables dans la consolidation des droits et libertés, mais également de certaines fragilités. Le rapport souligne que des dossiers sensibles influencent la perception internationale et sont parfois utilisés dans les évaluations pour renforcer ou affaiblir l’image du pays. Cette situation reflète à la fois les avancées réalisées et les controverses liées à l’instrumentalisation politique de certains cas, qui alimentent le débat sur la crédibilité des indicateurs utilisés.
Le Maroc illustre ce que plusieurs observateurs qualifient d’expérience hybride, combinant des éléments démocratiques et d’autres plus proches d’un modèle autoritaire. Les élections, la reconnaissance de certaines libertés et l’ouverture institutionnelle témoignent de pratiques démocratiques. Mais la faiblesse de la représentativité, les limites dans l’indépendance judiciaire et les interrogations autour de la compétitivité électorale entretiennent l’idée d’un système à mi-chemin entre deux modèles.
Cette hybridité se traduit par une tension constante entre les aspirations démocratiques et la persistance de pratiques centralisées dans la prise de décision.
Stabilité politique et comparaisons régionales
Malgré les défis relevés, le rapport indique que le Maroc conserve un niveau de stabilité démocratique et politique supérieur à celui de plusieurs pays voisins. Contrairement à la Tunisie, qui connaît un recul notable de ses institutions démocratiques après avoir longtemps été considérée comme un modèle de transition post-2011, le Maroc maintient une certaine continuité institutionnelle. La Tunisie traverse actuellement une phase marquée par la concentration des pouvoirs entre les mains de l’Exécutif, l’affaiblissement des instances indépendantes et un rétrécissement du champ politique et civil. Le Maroc, de son côté, bien qu’ffrontant des fragilités, n’a pas connu de dégradation systématique comparable.
En conclusion, le classement 2025 met en lumière la situation particulière du Maroc, qui se situe dans une zone intermédiaire sur l’échiquier mondial de la démocratie. Le pays affiche une certaine stabilité politique et a accompli des progrès réels dans plusieurs domaines, notamment en matière de participation et de droits, ce qui lui permet de conserver une avance sur plusieurs pays de son environnement régional immédiat. Cette position traduit la capacité du Royaume à maintenir une dynamique démocratique minimale et à éviter les reculs drastiques observés dans d’autres contextes.
Cependant, cette stabilité s’accompagne de limites structurelles persistantes. Les résultats soulignent des faiblesses notables dans la représentativité politique, la qualité du processus électoral et l’indépendance du pouvoir judiciaire, ainsi que dans les garanties effectives offertes aux citoyens en matière de libertés publiques et individuelles. Ces zones d’ombre empêchent le Maroc de rejoindre le cercle restreint des démocraties africaines les plus performantes, à l’image du Cap-Vert, du Ghana ou encore de l’Afrique du Sud.