Alors que l’été bat son plein, les vagues de chaleur accompagnées de vents forts se sont acharnées sur des écosystèmes arborés déjà malmenés par une longue sécheresse, provoquant dans le Nord du Royaume des départs de feux simultanés et difficiles à circonscrire rapidement. Si en 2024, les superficies incendiées n’avaient pas dépassé les 780 hectares, cette année, en une seule nuit (du 12 au 13 août), de violents brasiers déclarés près de Chefchaouen et Tétouan ont ravagé plus de 500 hectares de forêts et de champs environnants. Pour y faire face, les autorités ont déployé un dispositif important, incluant 450 éléments d’intervention, quatre Canadair et quatre avions Turbo Thrush. Pourtant, les conditions météorologiques extrêmes - faible humidité, températures très élevées, vents dépassant les 40 km/h et densité du couvert forestier - ont considérablement compliqué les opérations d’extinction, explique Youssef Zarroqi, directeur provincial de l’Agence Nationale des Eaux et Forêts (ANEF). Et alors que la situation semble désormais sous contrôle, l’expérience des dernières années rappelle combien elle peut évoluer rapidement, sous l’effet combiné de la chaleur, du vent et de l’assèchement brutal de la végétation. À l’échelle du bassin méditerranéen, la saison des feux s’étire désormais sur plusieurs mois, augmentant la pression sur les dispositifs de surveillance et d’intervention. L’ANEF appelle ainsi à une vigilance constante, en particulier dans les zones à risque, et rappelle les règles élémentaires : ne pas allumer de feu en milieu naturel, éviter de jeter des mégots ou des déchets inflammables, et signaler immédiatement toute fumée suspecte.
Pivots de la stratégie nationale
Une conscience collective s’est imposée au fil des années, permettant à la stratégie nationale de lutte contre les incendies de porter ses fruits. Le Maroc a multiplié les mesures et renforcé ses moyens d’intervention, notamment grâce à la mise en place d’un système avancé de cartographie et à l’acquisition d’un 7ème Canadair CN-ATS de type CL-415. La flotte aérienne est désormais déployée de manière stratégique dans les zones les plus exposées, garantissant des interventions plus rapides et plus efficaces. L’arrivée du CL-415, bombardier d’eau amphibie spécialement conçu pour la lutte contre les feux de forêts, constitue un atout majeur. Plus performant que son prédécesseur, le CL-215, il peut emporter jusqu’à 6137 litres d’eau et se ravitaille directement dans les lacs. Polyvalent, l’appareil peut également être mobilisé pour des missions de recherche, de sauvetage ou de transport de personnes et de matériel. «Ces avions ont été mobilisés dans sept incendies majeurs, réalisant environ 250 largages et protégeant ainsi 19.000 hectares de forêt», avait affirmé l’ANEF la saison dernière, qui fut exceptionnelle en termes de maîtrise des incendies. La baisse des dégâts s'expliquait aussi par une stratégie d'attaque précoce des feux, puisque la politique de prévention adoptée par les partenaires, incluant le ministère de l’Intérieur, l'ANEF, la Protection Civile, les Forces Armées Royales, et autres, a permis de maîtriser 80% des départs de feu avant qu’ils n’atteignent un hectare.
Dans ce contexte, la capacité d’anticiper les feux avant leur déclenchement devient un enjeu majeur. Pour Fouad Assali, chef du Centre national de gestion des risques climatiques forestiers, rattaché à l’Agence Nationale des Eaux et Forêts, «avec l’impact du changement climatique, ressenti à l’échelle internationale, les prévisionnistes et spécialistes estiment que la pression des incendies de forêts augmentera de plus de 35% d’ici 2050. Il est donc impératif d’anticiper cette évolution par la mise en place de stratégies adaptées et par la mobilisation des ressources nécessaires, afin d’en limiter l’impact et les dégâts». L’expert précise que le Maroc fait d’ailleurs partie des pays qui sont dans cette dynamique et qui se dotent au fur et à mesure des moyens techniques et technologiques nécessaires.
Efficacité en action !
En effet, le plan d’action de l’ANEF, élaboré en collaboration avec la Direction Générale de la Météorologie, a permis de mobiliser des moyens d’alerte et d’intervention plus efficaces et plus performants, notamment par le pré-positionnement adéquat des moyens d’intervention terrestres et aériens, à proximité des lieux de départ possible d’incendies, ce qui se traduirait par la réduction des temps d’intervention et une plus grande efficacité des opérations.
Ce processus présente une carte quotidienne des scores de risques d’éclosion avec une résolution très fine, accompagné d’une analyse du risque, pour fournir de précieuses informations aux équipes prépositionnées sur le terrain, tout en prenant en considération des facteurs tels que l’évolution météo, des images satellites récentes, des informations socio-économiques, et sur la nature et l’état du couvert forestier.
Cela dit, l’ANEF appelle instamment les utilisateurs des espaces forestiers, tels que les campeurs, apiculteurs, éleveurs, à faire preuve de vigilance, rappelant qu'il est crucial de limiter l’utilisation du feu et de signaler immédiatement tout départ de feu ou comportement suspect aux autorités compétentes.
Pivots de la stratégie nationale
Une conscience collective s’est imposée au fil des années, permettant à la stratégie nationale de lutte contre les incendies de porter ses fruits. Le Maroc a multiplié les mesures et renforcé ses moyens d’intervention, notamment grâce à la mise en place d’un système avancé de cartographie et à l’acquisition d’un 7ème Canadair CN-ATS de type CL-415. La flotte aérienne est désormais déployée de manière stratégique dans les zones les plus exposées, garantissant des interventions plus rapides et plus efficaces. L’arrivée du CL-415, bombardier d’eau amphibie spécialement conçu pour la lutte contre les feux de forêts, constitue un atout majeur. Plus performant que son prédécesseur, le CL-215, il peut emporter jusqu’à 6137 litres d’eau et se ravitaille directement dans les lacs. Polyvalent, l’appareil peut également être mobilisé pour des missions de recherche, de sauvetage ou de transport de personnes et de matériel. «Ces avions ont été mobilisés dans sept incendies majeurs, réalisant environ 250 largages et protégeant ainsi 19.000 hectares de forêt», avait affirmé l’ANEF la saison dernière, qui fut exceptionnelle en termes de maîtrise des incendies. La baisse des dégâts s'expliquait aussi par une stratégie d'attaque précoce des feux, puisque la politique de prévention adoptée par les partenaires, incluant le ministère de l’Intérieur, l'ANEF, la Protection Civile, les Forces Armées Royales, et autres, a permis de maîtriser 80% des départs de feu avant qu’ils n’atteignent un hectare.
Dans ce contexte, la capacité d’anticiper les feux avant leur déclenchement devient un enjeu majeur. Pour Fouad Assali, chef du Centre national de gestion des risques climatiques forestiers, rattaché à l’Agence Nationale des Eaux et Forêts, «avec l’impact du changement climatique, ressenti à l’échelle internationale, les prévisionnistes et spécialistes estiment que la pression des incendies de forêts augmentera de plus de 35% d’ici 2050. Il est donc impératif d’anticiper cette évolution par la mise en place de stratégies adaptées et par la mobilisation des ressources nécessaires, afin d’en limiter l’impact et les dégâts». L’expert précise que le Maroc fait d’ailleurs partie des pays qui sont dans cette dynamique et qui se dotent au fur et à mesure des moyens techniques et technologiques nécessaires.
Efficacité en action !
En effet, le plan d’action de l’ANEF, élaboré en collaboration avec la Direction Générale de la Météorologie, a permis de mobiliser des moyens d’alerte et d’intervention plus efficaces et plus performants, notamment par le pré-positionnement adéquat des moyens d’intervention terrestres et aériens, à proximité des lieux de départ possible d’incendies, ce qui se traduirait par la réduction des temps d’intervention et une plus grande efficacité des opérations.
Ce processus présente une carte quotidienne des scores de risques d’éclosion avec une résolution très fine, accompagné d’une analyse du risque, pour fournir de précieuses informations aux équipes prépositionnées sur le terrain, tout en prenant en considération des facteurs tels que l’évolution météo, des images satellites récentes, des informations socio-économiques, et sur la nature et l’état du couvert forestier.
Cela dit, l’ANEF appelle instamment les utilisateurs des espaces forestiers, tels que les campeurs, apiculteurs, éleveurs, à faire preuve de vigilance, rappelant qu'il est crucial de limiter l’utilisation du feu et de signaler immédiatement tout départ de feu ou comportement suspect aux autorités compétentes.
3 questions à Fouad Assali, Chef du CNRGCF : « Ce type de situation est gérable, mais il exige une vigilance permanente »
- La coopération entre les différents corps et parties prenantes engagées dans la lutte contre les feux de forêts a-t-elle gagné en efficacité et en coordination ?
Effectivement, grâce notamment à plusieurs années de travail commun où nous avons continuellement amélioré nos protocoles. Les mots me manquent pour qualifier le haut degré d’abnégation et de dévouement dont font preuve les diverses équipes engagées. Je tiens ici à remercier la Gendarmerie Royale, la Protection Civile, les Forces Royales Air, les Forces Armées Royales, les Forces Auxiliaires, la Défense Nationale, l’Intérieur, les autorités locales, les Eaux et Forêts, ainsi que tous ceux qui collaborent de près ou de loin dans cette lutte. Chacun apporte et continue à apporter une contribution vitale et déterminante.
- Le Maroc adapte-t-il sa stratégie face à l’intensification des risques liés au changement climatique, notamment en matière de moyens aériens ?
Au Maroc, l’impact du changement climatique est une réalité structurelle avec laquelle il faut désormais composer. Durant les dix dernières années, nous avons enregistré une élévation de température oscillant entre +0,5 et +1,5 °C au-dessus de la normale. En 2024, l’écart était de +1,49 °C, ce qui se traduit par un allongement de la période sèche, une végétation plus rapidement désséchée, des dépérissements et une inflammabilité accrue des peuplements forestiers. Cela dit, nos moyens sont en adéquation avec la cartographie des risques : six Canadairs opérationnels (Forces Royales Air), entre 12 et 14 avions Turbo-Thrush (Gendarmerie Royale), répartis sur les régions sensibles, et 14 drones en cours d’intégration progressive dans nos dispositifs de surveillance. Ce maillage est renforcé par la montée en compétence continue de nos équipes locales, notamment à travers des formations dédiées à la gestion forestière et à l’usage des technologies aériennes.
- La concentration des feux de forêts que nous vivons est-elle inhabituelle ?
En réalité, non. Pour le Maroc, enregistrer huit incendies simultanés durant cette période n’est pas hors norme. Ce type de situation est gérable, mais il exige une vigilance permanente. D’autant que le dessèchement de la végétation est progressif et qu’il renforce mécaniquement les facteurs de risque. Nous observons également que certaines zones, notamment dans le Nord, ont connu un développement important de la biomasse végétale à la suite des pluies tardives, ce qui, une fois desséché, constitue un facteur aggravant. C’est pourquoi nos interventions intègrent aussi une approche préventive, avec des opérations de sylviculture et de gestion du combustible végétal.
Bulletin d’alerte : Menace extrême
L'Agence Nationale des Eaux et Forêts (ANEF) vient d'annoncer la publication de son Bulletin de risque des incendies de forêts (BRIF) couvrant la période allant du 17 au 20 août, sur la base de modèles scientifiques de prédiction et d’analyse des données liées à la nature des forêts, leur combustibilité et leur inflammabilité, ainsi qu’aux paramètres topoclimatiques. Selon ce bulletin, un risque extrême d’incendie est identifié dans les provinces de Chefchaouen, Fahs-Anjra, Tanger-Asilah, M'diq-Fnideq et Taza, tandis qu'un risque élevé est relevé dans les provinces d’Al Hoceima, Larache, Ouezzane, Tétouan, Ifrane et Taounate. Par ailleurs, un risque moyen concerne les provinces de Berkane, Driouch, Nador, Oujda-Angad, Sefrou, Rabat, Salé, Skhirate-Témara, Azilal, Béni Mellal, Khénifra, Essaouira et Agadir Ida-Outanane, précise l’ANEF dans son bulletin. L’ANEF invite les citoyens à alerter rapidement les autorités locales en cas d’observation de fumées ou de comportements suspects à proximité des massifs forestiers.
Régénération des forêts : Un processus qui prend son temps
Le retour progressif à la vie d’une forêt méditerranéenne qui a été détruite par le feu est un long processus. Les insectes sont généralement les premières espèces à réinvestir les lieux puisque les arbres affaiblis représentent une source de nourriture et un lieu de ponte, surtout pour les mouches et les coléoptères.
Attirés par la présence de ces insectes, les oiseaux ne tardent pas à revenir vers ces zones qui sont pourtant encore loin d’avoir récupéré leur couvert végétal. Dans la majorité des cas, les mousses et petites plantes font leur apparition durant les 12 mois qui suivent l’incendie, surtout lorsque des conditions météorologiques et pluviométriques favorables sont au rendez-vous.
Grâce à leurs écorces, des espèces comme le pin ou le chêne-liège arrivent souvent à survivre au feu et entament doucement leur régénération naturelle durant les années qui suivent l’incendie. Dans le bassin méditerranéen, certaines espèces de faune réinvestissent les forêts régénérées après seulement une ou deux années de l’incendie.
En moyenne, il faut compter 3 à 5 ans afin de permettre aux herbes et aux arbustes de recouvrir les traces du feu. Ce n’est seulement que 20 à 30 ans après l’incendie que la forêt retrouvera son aspect initial. Contrairement à l’exemple des forêts méditerranéennes, certaines forêts tropicales, notamment en Amazonie, sont beaucoup moins résilientes aux incendies et nécessitent une à plusieurs centaines d’années avant de retrouver leurs caractéristiques et leur aspect original.
Attirés par la présence de ces insectes, les oiseaux ne tardent pas à revenir vers ces zones qui sont pourtant encore loin d’avoir récupéré leur couvert végétal. Dans la majorité des cas, les mousses et petites plantes font leur apparition durant les 12 mois qui suivent l’incendie, surtout lorsque des conditions météorologiques et pluviométriques favorables sont au rendez-vous.
Grâce à leurs écorces, des espèces comme le pin ou le chêne-liège arrivent souvent à survivre au feu et entament doucement leur régénération naturelle durant les années qui suivent l’incendie. Dans le bassin méditerranéen, certaines espèces de faune réinvestissent les forêts régénérées après seulement une ou deux années de l’incendie.
En moyenne, il faut compter 3 à 5 ans afin de permettre aux herbes et aux arbustes de recouvrir les traces du feu. Ce n’est seulement que 20 à 30 ans après l’incendie que la forêt retrouvera son aspect initial. Contrairement à l’exemple des forêts méditerranéennes, certaines forêts tropicales, notamment en Amazonie, sont beaucoup moins résilientes aux incendies et nécessitent une à plusieurs centaines d’années avant de retrouver leurs caractéristiques et leur aspect original.