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Attaques d’orques : Les dessous d’une supposée invasion du littoral marocain [INTÉGRAL]


Rédigé par Omar ASSIF Dimanche 18 Juin 2023

Phénomène étrange et inédit, plusieurs bateaux ont été attaqués et parfois coulés à cause d’attaques d’orques (épaulards) dans les eaux territoriales nationales au niveau du Détroit de Gibraltar.



Grand mammifère marin bien identifiable à ses couleurs noir et blanc, l’orque n’en est pas moins un grand prédateur et un « poids lourd » des mers. Comme d’autres cétacés, cet animal fascine, mais sa représentation auprès du grand public est parfois contradictoire. D’un côté, tout le monde (quasiment) se rappelle du film « Sauvez Willy », où un petit garçon va libérer une orque (inoffensive et amicale) d’un delphinarium avec la musique de Michael Jackson en arrière-plan. De l’autre côté, il y a « Orca killer », film dans lequel le mammifère marin est représenté dans le scénario comme parmi les plus sanguinaires des dents de la mer. Pourtant, les attaques d’orques ne sont quasiment jamais répertoriées, sauf quelque rares cas où des spécimens captifs ont tué ou blessé leurs dresseurs dans des parcs à thème marin. N’empêche que les orques méditerranéennes sont actuellement en train de développer des comportements agressifs qui ne cessent de défrayer la chronique et d’inquiéter les scientifiques, les pêcheurs et les plaisanciers.
 
Dégâts et sueurs froides
 
Dans une récente dépêche, l’AFP explique ainsi que « depuis trois ans, les attaques d'orques contre des voiliers se multiplient au large des côtes de l'Espagne (et donc du Maroc), suscitant les interrogations des scientifiques et des autorités, notamment sur le rôle mystérieux de Gladis, matriarche d'un clan de cette espèce réputée pour son intelligence ». Ces "interactions", terme employé par les spécialistes et les autorités pour décrire ces attaques, ont débuté en 2020 au large des côtes atlantiques de la péninsule ibérique, particulièrement entre Cadix et Tanger. Harcelant les voiliers en particulier, les groupes d’orques s’attaquent directement au safran de l’embarcation (partie immergée du dispositif qui permet d'orienter le navire, NDLR) occasionnant parfois des dégâts importants et des sueurs froides aux navigateurs. Ainsi, selon l'Organisation de sauvetage en mer espagnole Salvamento Marítimo, 28 "interactions" ont déjà eu lieu en 2023. Entre 2020 et 2022, leur nombre avait atteint près de 500, selon le Groupe de Travail sur l'Orque de l'Atlantique (GTOA).
 
Pistes et hypothèses
 
Certains bateaux ont été coulés au vu des dégâts que les coups de ces mammifères colossaux ont occasionnés. Les spécialistes qui suivent de près ce phénomène sans précédent sont mitigés lorsqu’il s’agit de tenter d’expliquer ces attaques. Plusieurs pistes et spéculations sont ainsi évoquées : transmission par l’orque au nom de Gladis d’un comportement agressif aux autres membres de son groupe, simples jeux qui font des dégâts aux bateaux et sont ainsi interprétés comme des attaques, ou, encore, comportement de protection des proies (thons rouges) qui sont à proximité… Une cartographie des interactions répertoriées durant l’année 2023 place un certain nombre de ces « accidents » à proximité des côtes méditerranéennes marocaines. Pourtant, les bateaux marocains de pêche semblent épargnés pour l’instant d’attaques destructrices. Cela n’empêche pas les biologistes marins marocains de s’intéresser à ce nouveau phénomène et de formuler leur propre interprétation.
 
La faim justifie le moyen ?
 
« Il existe certainement des corrélations entre la dégradation des ressources halieutiques en Méditerranée et les comportements inédits qui ont été documentés. Cela dit, cette hypothèse doit faire l’objet d’études scientifiques solides», confirme ainsi Mustapha Aksissou, professeur de biologie marine à l’université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan. « Je pense pour l’instant que ces orques attaquent des embarcations qu’elles confondent avec des bateaux de pêche qui ciblent le thon. Ces animaux intelligents ont une mémoire et se vengent des bateaux qui les privent de leur alimentation. Cela dit, il paraît que ces dernières années le nombre d’attaques a diminué depuis l’imposition de quotas de pêches, puisque cela laisse aux orques un peu de disponibilité de nourriture », précise notre interlocuteur. Faut-il pour autant rester indifférent face à ce qui ressemble à une invasion des orques dans nos eaux territoriales ? « Si une orque méditerranéenne est en chasse pour se nourrir, que les ressources ne sont pas suffisantes et que l’opportunité d’attaquer un humain qui nage en mer se présente, il est tout à fait possible qu’elle le fasse », met en garde le biologiste.

En attendant et fort heureusement, malgré la prolifération d’images vraies ou fake sur les réseaux sociaux mettant en scène de supposées incursions d’orques au plus proche des côtes marocaines, aucun incident significatif n’a pour le moment été signalé. Ce qui n’empêche guère l’émergence d’un début de psychose parmi l’opinion publique non avertie qui appréhende des attaques de ces grands mammifères marins ou celles de requins, comme ce fut le cas récemment en Égypte, pendant la saison estivale.
 

3 questions à Mustapha Aksissou « Dans leur écosystème, les orques sont au sommet de la chaîne alimentaire »

Professeur de biologie marine à l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, Pr Mustapha Aksissou répond à nos questions concernant les orques de la Méditerranée.
Professeur de biologie marine à l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, Pr Mustapha Aksissou répond à nos questions concernant les orques de la Méditerranée.
Les orques peuvent-elles vivre en solitaire ou sont-elles systématiquement en groupes ?

- Les orques sont souvent observées en groupes puisqu’en tant que mammifères marins, ces animaux ont des comportements communautaires liés à la protection de leurs petits et au cycle de reproduction, d’allaitement, etc. Il s’agit par ailleurs d’animaux qui sont plus migrateurs que sédentaires. La documentation qui consigne les diverses observations de cette espèce va plutôt dans le sens de groupes de plusieurs individus qui évoluent ensemble. Cela n’empêche cependant pas de trouver des individus isolés ou solitaires.

L’agressivité des orques est-elle plus marquée lorsqu’il s’agit d’un individu solitaire plutôt qu’un membre d’un groupe ?

- Dans leur écosystème, les orques sont au sommet de la chaîne alimentaire. Elles partagent cette caractéristique avec d’autres animaux comme les requins par exemple. Donc, vis-à-vis d’autres animaux qui peuvent représenter des proies potentielles, elles ont naturellement un comportement carnassier. Il s’agit quand même de grands prédateurs qui peuvent s’attaquer à des espèces qui parfois ont des tailles assez importantes, notamment d’autres espèces de cétacés.

Les orques sont-elles abondantes au large des côtes méditerranéennes marocaines ?

- L’orque est un animal qui est plutôt rare au niveau des côtes méditerranéennes marocaines. Ce genre d’espèces est plus abondant dans des écosystèmes marins caractérisés par des eaux plus chaudes, notamment au niveau de zones tropicales ou tempérées. Cette espèce existe et évolue bien évidemment en Méditerranée, mais comparativement à d’autres régions, il y a une certaine rareté en termes de présence des orques.

Ecologie : Des orques en compétition avec les pêcheurs du thon rouge

Selon le site du Groupe de Travail sur l'Orque de l'Atlantique (GTOA), les orques qui évoluent dans la zone du Détroit de Gibraltar sont considérées comme une « sous-population » de l’espèce. Elles se caractérisent par une petite morphologie comparativement avec d’autres groupes qui évoluent ailleurs dans le monde. Le mâle adulte mesure ainsi entre 5 et 6 mètres, possède une tête émoussée, une cape dorsale relativement peu contrastée. Particulièrement friandes de thons rouges, les orques « ibériques » les chassent activement et ne manquent pas de se rabattre sur le butin des palangriers et des thoniers.

Lors de ces « interactions », les orques scrutent la zone autour des bateaux de pêche, jusqu’à ce qu'elles repèrent un thon pris sur une ligne puis s’en emparent avant que les pêcheurs ne puissent le ramener à la surface. En 2011, 39 individus d’orques ibériques avaient été recensés par les scientifiques. En 2023, les recensements ont fait état de 35 individus ibériques répartis en 6 communautés distinctes en plus de 14 individus solitaires observés plusieurs fois.

 

L’info...Graphie


Squales meurtriers : Ces requins tueurs qui hantent les baigneurs et les plongeurs

Depuis la sortie en 1975 du film « Les dents de la mer », la frayeur des requins hante les baigneurs dans les plages du monde entier. Beaucoup de scientifiques et d’écologistes accusent ce film d’avoir donné aux requins une image déformée et injuste.

Les attaques de requins que subissent des baigneurs et des surfeurs dans plusieurs régions du monde - Australie et Afrique du Sud notamment - prouvent cependant que ces prédateurs ne sont pas complètement inoffensifs pour l’Homme et qu’ils peuvent dans certains cas et sous certaines latitudes s’avérer meurtriers. Le dernier épisode en date a eu lieu à un jet de pierre d’une plage égyptienne ce 8 juin.

Un touriste russe qui se baignait tranquillement dans les eaux azur de la mer Rouge a ainsi été mortellement attaqué par un requin-tigre. La séquence a été filmée par des estivants puis a largement circulé sur les réseaux sociaux.

Fait inédit, les autorités égyptiennes ont assuré avoir capturé le requin en question et ont annoncé que des examens en laboratoire étaient au programme afin de « déterminer les raisons de l'attaque rare ». À noter que durant l’année 2022, deux autres touristes étrangers (un Autrichien et un Roumain) avaient pourtant subi le même sort en Egypte.

L'International Shark Attack File, qui est une base de données mondiale qui recense les attaques de requins contre les humains, indique cependant que ce genre d’accident est « très faible » : une chance sur 4 millions.








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