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Tunisie : Le parlement approuve un remaniement sur fond de contestation


Mercredi 27 Janvier 2021

Le parlement tunisien a approuvé, mardi, un remaniement du gouvernement, alimentant les tensions entre le Premier ministre et le chef de l’Etat.



Tunisie : Le parlement approuve un remaniement sur fond de contestation
Des centaines de manifestants ont protesté dans la journée contre les inégalités sociales et les violences policières.

La police a fait usage de canons à eau pour disperser la foule qui s’était rassemblée près du siège du parlement à Tunis.

Hichem Mechichi a nommé 11 nouveaux ministres et a dit espérer que cela permettra d’insuffler un nouveau souffle à son gouvernement.

«Les jeunes protestant devant le parlement nous rappellent nos priorités», a déclaré le Premier ministre. «Leurs manifestations sont légitimes et le gouvernement va écouter la jeunesse en colère». Des centaines de personnes ont manifesté mardi contre la classe politique et la répression policière près du siège barricadé du Parlement à Tunis, où les députés débattent d’un large remaniement du gouvernement dans un contexte de tensions politiques.

A l’appel d’une trentaine d’associations, les manifestants, dont certains sont venus à pieds du quartier populaire d’Ettadhamen, ont été empêchés d’arriver devant l’Assemblée, relégués à une rue adjacente par un très important dispositif policier.

« Liberté, dignité pour les quartiers populaires »
Certains députés ont protesté contre ce déploiement massif, appelant à davantage de dialogue dans un pays touché de plein fouet par la pandémie du nouveau coronavirus et ses retombées sociales.

«Liberté, dignité pour les quartiers populaires», «A bas le régime policier», ont lancé les manifestants, scandant également des slogans contre le gouvernement ou contre le principal parti au Parlement, le mouvement d’inspiration islamiste Ennahdha.

Les manifestants ont protesté surtout contre la stratégie de répression adoptée face au mouvement de contestation sociale qui a éclaté à la mi-janvier dans des zones marginalisées du pays, au lendemain du 10e anniversaire de la révolution qui a fait chuter le 14 janvier 2011 le dictateur Zine El Abidine Ben Ali, après 23 ans de pouvoir.

Plusieurs nuits durant, des jeunes ont jeté des pierres sur la police déployée pour faire respecter un couvre-feu imposé pour des raisons sanitaires. La police a tiré des gaz lacrymogènes et arrêté plus d’un millier de jeunes, dont de nombreux mineurs selon des défenseurs des droits humains qui ont déploré des abus.

Des manifestations pour réclamer la libération des personnes arrêtées et une meilleure politique sociale ont également eu lieu, alors que les restrictions sanitaires ont affecté les plus précaires et coûté des dizaines de milliers d’emplois. Le chômage touche plus d’un jeune sur trois.

«Les acteurs politiques produisent les mêmes stratégies qui n’ont abouti jusqu’à maintenant qu’à des échecs», a estimé la présidente de l’Association des femmes tunisiennes démocrates, Yosra Frawes. «Qu’ils changent leur modèle de gouvernance, ou qu’ils quittent le pouvoir».

La session parlementaire intervient au lendemain de troubles entre des protestataires et la police à Sbeïtla, dans une région marginalisée du centre tunisien, après le décès d’un jeune blessé la semaine dernière par une cartouche de gaz lacrymogène lors d’une manifestation.

De nouveaux heurts entre policiers et manifestants ont éclaté mardi en marge des funérailles du jeune homme, a constaté un correspondant de l’AFP

Clivages politiques entre la présidence et la primature
Au Parlement, certains députés d’opposition ont brandi son portrait.

Signe des clivages politiques grandissants, le président Kais Saied a vertement critiqué ce remaniement lundi, regrettant ne pas avoir été consulté.

Il a fustigé l’absence de femmes parmi les ministres proposés et accusé l’un des ministres choisis d’être «lié à une affaire de corruption» et trois autres d’être soupçonnés de «conflit d’intérêt», sans préciser de noms.

Cela augure de nouveaux tiraillements sur la composition du gouvernement, une tâche particulièrement laborieuse depuis les législatives de 2019, qui ont abouti à un Parlement divisé en une myriade de partis formant des alliances fragiles.

Mechichi, nommé en juillet par le président Saied, avait composé une équipe comprenant de nombreux fonctionnaires ou universitaires, dont certains proches du président. Mais il s’est graduellement éloigné de Saied, jusqu’à recomposer son équipe avec l’appui d’Ennahdha.

Saied a menacé d’empêcher la prestation de serment de certains nouveaux ministres, au risque d’accentuer les animosités qui paralysent l’action politique.

La société civile condamne Ennahda
Des organisations de la société civile tiennent la classe politique responsable de la situation dans le pays en faisant prévaloir ses propres intérêts et en alimentant les discours de haine. Ces organisations ont condamné les déclarations « graves » du président du conseil de la Choura (Ennahdha) qui selon eux contiennent un appel implicite à la division.

De même qu’ils s’interrogent sur le mutisme « suspect » de la présidence du gouvernement et appellent la justice à intervenir pour faire face à « la police parallèle » qui agit pour le compte de certains partis.

Dans une déclaration commune publiée lundi, 28 associations affirment soutenir les revendications sociales et économiques des Tunisiens, dans le cadre d’une approche alternative de développement, globale et équitable. Les associations ont appelé à un jour de colère mardi devant le parlement, lors de la plénière de vote de confiance aux nouveaux ministres proposés par le chef du gouvernement Hichem Mechichi.

Les signataires expriment, dans leur déclaration, le refus absolu du traitement sécuritaire des mouvements sociaux et dénoncent l’arrestation de centaines de jeunes, parmi les catégories faibles et marginalisées.