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International

Soudan : La trêve mort-née


Rédigé par L'Opinion Mardi 23 Mai 2023

Des combats et des raids aériens ont eu lieu dans la nuit de lundi à mardi à Khartoum, faisant fi de la trêve signée à Jeddah, et des promesses des deux généraux en conflit de la respecter.



Après l'entrée en vigueur officielle de la trêve à 19H45 GMT, des habitants de la banlieue nord-est de Khartoum ont fait état de combats, dans le sud de la capitale, d’autres ont rapporté à l'AFP des frappes aériennes.

"Au-delà des annonces officielles, le Soudan est toujours bombardé et des millions de civils sont en danger", s'est alarmé Karl Schembri, du Norwegian Refugee council (NRC), dénonçant sur Twitter "plus d'un mois de promesses rompues", alors que près d'une dizaine de trêves ont déjà échoué dès leurs premières minutes.

Lundi de nouveau, les cinq millions d'habitants de la capitale soudanaise ont passé la journée au milieu des combats, sous une chaleur écrasante, pour la plupart privés d'eau, d'électricité et de télécommunications.

L'ONU avait noté en fin d'après-midi "des combats et des mouvements de troupes alors que les deux camps se sont engagés à ne pas chercher à prendre l'avantage militaire avant l'entrée en vigueur de la trêve".

Les médiateurs américains et saoudiens avaient annoncé avoir obtenu, après deux semaines de négociations, une trêve d'une semaine pour relancer services et hôpitaux et réapprovisionner stocks humanitaires et marchés pillés ou bombardés.
 
Un autre hôpital fermé
 
Tôt mardi, le syndicat des médecins a annoncé la fermeture d'un nouvel hôpital dans la grande banlieue de Khartoum. Son personnel a été forcé d'arrêter de travailler, pris entre deux feux.

D'un côté, "plusieurs fois, des combattants des FSR ont agressé des patients et du personnel soignant en tirant dans les couloirs de l'hôpital", rapporte le syndicat. De l'autre, des haut-gradés de l'armée régulière mènent "une campagne de mensonges et de rumeurs" contre les médecins qui ont reçu "des menaces contre leur personne".

Les médecins ne cessent d'alerter sur le sort dramatique des hôpitaux: à Khartoum, comme au Darfour, ils sont quasiment tous hors d'usage. Ceux qui n'ont pas été bombardés n'ont plus de stocks ou sont occupés par des belligérants.

Les humanitaires réclament des couloirs sécurisés et, cette fois, assurent Ryad et Washington, il y aura "un mécanisme de surveillance du cessez-le-feu" regroupant des représentants des deux camps ainsi que des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite.

Jusqu'ici, aucun des médiateurs n'a fait de commentaire depuis l'entrée en vigueur de la trêve. Un mécanisme de sanction est la clé pour les experts face à deux généraux persuadés de pouvoir l'emporter militairement et donc plus prêts à une guerre longue qu'à des concessions à la table des négociations.

Les deux camps ont annoncé vouloir respecter ce cessez-le-feu mais à Khartoum, les habitants ont dit ne voir aucun préparatif.
 
La guerre a rendu Khartoum invivable
 
"On ne voit aucun signe que les FSR, qui occupent toujours les rues, se préparent à les quitter", rapportait lundi à l'AFP l'un d'eux, Mahmoud Salaheddine.

Si l'armée contrôle les airs, elle a peu d'hommes dans le centre de la capitale, tandis que les FSR, elles, occupent le terrain à Khartoum. De nombreux habitants les accusent d'avoir pillé leurs maisons ou d'y avoir installé des QG.

Malgré tout, Thouraya Mohammed espère que les armes se tairont, au moins le temps de sortir.

"S'il y a vraiment une trêve, je vais prendre mon père, qui est malade, et nous allons partir de Khartoum pour aller n'importe où ailleurs", dit-elle à l'AFP. Car "la guerre a rendu cette ville invivable: tout y a été détruit", poursuit-elle.

D'autres habitants, eux, racontent vouloir aller voir un médecin après des semaines sans consultation pour les malades chroniques ou espérer que les employés des services publics pourront sortir pour rétablir l'eau courante, l'électricité ou les réseaux internet et téléphone.
Alors que 25 millions des 45 millions de Soudanais ont besoin d'aide humanitaire, selon l'ONU, les vivres se font de plus en plus rares, les banques sont fermées et la plupart des usines agro-alimentaires ont été détruites ou pillées.

"Nous avons tous faim, les enfants, les vieux, tout le monde souffre de la guerre. Nous n'avons plus d'eau", raconte à l'AFP Souad al-Fateh, une habitante de Khartoum.
Si le conflit se poursuit, selon l'ONU, un million de Soudanais supplémentaires pourraient fuir vers les pays voisins qui redoutent une contagion de la violence.

 

L'ONU appréhende une "ethnicisation" du conflit

Le chef de la mission de l'ONU au Soudan, Volker Perthes, a dit craindre lundi devant le Conseil de sécurité une "ethnicisation" du conflit dans le pays, tout en appelant l'armée et les paramilitaires à mettre en œuvre le cessez-le-feu.

"L'ethnicisation croissante du conflit risque de le prolonger avec des implications pour la région", a déclaré l'émissaire lors d'une réunion du Conseil de sécurité sur la situation au Soudan.

"Dans certaines parties du pays, les combats entre les deux armées ou les deux formations, ont ravivé des tensions communautaires ou provoqué des conflits entre communautés", a-t-il ajouté.

"Des signaux inquiétants de mobilisation tribale ont été rapportés dans d'autres parties du pays, tout particulièrement au Kordofan du Sud", a-t-il dit.

Le représentant spécial de l'ONU a de nouveau plaidé pour le respect d'un cessez-le-feu à quelques heures de son entrée en vigueur prévu à 19H45 GMT pour une durée de sept jours et qui doit notamment permettre de laisser passer civils et aide humanitaire.

"Je continue de sommer les parties d'honorer cet accord qu'elles ont signé il y a deux jours", a-t-il dit.

Il s'est encore dit "horrifié par les informations faisant état de violences sexuelles contre des femmes et des filles dont des allégations de viols à Khartoum et au Darfour" dans l'ouest du pays.

Dans le détail, quelque 860 civils dont 190 enfants ont été tués depuis le début du conflit et 3.500 civils blessés, selon des chiffres cités lundi par l'émissaire de l'ONU.








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