Le sous-Secrétaire d’Etat adjoint américain pour l’Afrique du nord, Joshua Harris, se rend au Maroc dans le cadre d’une tournée régionale après une brève escale en Algérie. Il s’agit de la deuxième visite du diplomate américain, “Monsieur Sahara”, comme on le surnomme dans la presse, qui a d’ores et déjà visité le Maroc le 6 septembre dernier, et rencontré le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita.
Le haut diplomate américain est mandaté par le Département d’Etat pour tenter d’enclencher une nouvelle dynamique dans le dossier du Sahara, dont le processus politique est gelé depuis 2019, l’année où furent tenues les dernières tables rondes sous les auspices de l’ex-Envoyé personnel du SG des Nations Unies, Horst Köhler.
Le haut diplomate américain est mandaté par le Département d’Etat pour tenter d’enclencher une nouvelle dynamique dans le dossier du Sahara, dont le processus politique est gelé depuis 2019, l’année où furent tenues les dernières tables rondes sous les auspices de l’ex-Envoyé personnel du SG des Nations Unies, Horst Köhler.
Washington fixe le cap
Bien avant son arrivée au Royaume, le Département d’Etat a voulu rassurer le Maroc de son plein soutien à son intégrité territoriale. Dans la soirée du dimanche, le Département d’Antony Blinken a publié un communiqué aux allures d’un agenda dans la mesure où le document dévoile les objectifs de cette visite très attendue. De façon claire et sans équivoque, le communiqué explique que Joshua Harris “réitérera qu’il n’y a aucun changement dans la position claire et constante des États-Unis”
Si le Département d’Etat s’est évertué à répéter que sa position demeure constante au sujet du Sahara, c’est parce que le discours de la diplomatie américaine sur ce dossier, depuis l’arrivée de l’Administration de Joe Biden à la Maison Blanche, a énigmatiquement été modifié. Les éléments de langage des démocrates dérogent relativement au discours clair et sans ambages de l’Administration Trump qui, depuis le 10 décembre 2020, a reconnu la marocanité du Sahara sans éprouver la moindre gêne de le déclarer haut et fort, sachant qu’elle a notifié immédiatement sa décision aux Etatsmembres du Conseil de Sécurité.
Les signaux confus de l’Administration Biden !
Par contre, l’Administration de Joe Biden, bien qu’elle ait maintenu la proclamation présidentielle signée par Trump, n’a jamais prononcé le mot “reconnaissance”, en se contentant de souligner le soutien au plan d’autonomie. En plus de cela, à chaque occasion, les diplomates américains parlent de processus politique et de solution mutuellement acceptable avec enthousiasme, laissant ainsi penser qu’ils n’attachent pas autant d’importance à leur décision maintenue.
L’ambiguïté de l’attitude américaine a d’autant plus interpellé les observateurs qu’un nombre de promesses de la déclaration tripartite Maroc/ Israël/Etats-Unis n’ont pas été tenues. On pense évidemment au Consulat américain à Dakhla qui n’a pas encore vu le jour. L’Administration Biden, rappelons-le, n’a même pas ouvert l’antenne virtuelle telle qu’envisagée dans un premier temps.
L’Administration américaine a continué à émettre des signaux ambivalents à l’endroit du Maroc, en laissant son ambassadrice à Alger, Elizabeth Aubin, profiter de son déplacement à Tindouf “à vocation humanitaire” pour s’afficher ostensiblement derrière le portrait du chef du Polisario, Brahim Ghali. Une maladresse, une bévue ? Peu importe l’appellation ! Mais le geste en soi a été très mal vu au Maroc. Il a été perçu comme une insouciance coupable ou une désinvolture irresponsable.
En revanche, au Nations Unies, Washington reste lisible. Dans sa volonté de soutenir les efforts de Staffan de Mistura pour relancer le processus politique, la diplomatie américaine s’est alignée sur la thèse marocaine dans la Résolution 2703 du Conseil de Sécurité, dont elle est le porte-plume.
Ce que signifie une telle visite
La visite de Joshua Harris semble différente des précédents déplacements des hauts diplomates étrangers dans la mesure où l’ordre du jour, tel que défini dans le communiqué du Département d’Etat, déroge au style formel de la communication américaine. “Les États-Unis estiment qu’une solution politique négociée doit être trouvée sans plus tarder”, lit-on dans le document, selon lequel Washington reste convaincu que la solution politique demeure l’horizon indépassable de tout règlement de ce différend régional.
Alger face aux pressions américaines
Que veut dire sans tarder ? C’est la question qui a fait couler beaucoup d’encre ces derniers jours lorsque l’émissaire américain était en Algérie, entamant sa tournée maghrébine. Selon les indiscrétions médiatiques, la tournée de Harris serait le reflet de la volonté de Washington de trouver une solution le plus rapidement possible à ce conflit qui n’a que trop duré dans un contexte régional hypertendu. La rupture des relations diplomatiques entre le Maroc et l’Algérie, deux piliers de la région, et la fragilité de l’accord de cessez-le-feu qui ne tient qu’à un fil à cause du retrait du Polisario, semblent plonger la région dans l’inconnu. Ce que Washington, dont le leadership est de plus en plus contesté dans le monde, redoute et veut, par conséquent, remettre les choses dans l’ordre.
Ce changement stratégique semble en faveur du Maroc pour autant que les Etats-Unis, à en croire des médias américains, semblent faire pression sur l’Algérie pour qu’elle abandonne sa politique belliqueuse à l’endroit du Maroc et qu’elle contribue à la solution politique plutôt que de faire le bâton dans la roue. Certaines sources médiatiques sont allées jusqu’à affirmer avec une certitude déconcertante que Joshua Harris a exhorté les dirigeants algériens à mettre fin à la rupture avec le Maroc. Consterné, le régime algérien a pesté en ne manquant pas de le faire savoir par des gestes symboliquement provocateurs. Le régime algérien, en proie à une soudaine prise de panique, a fermé son espace aérien à un avion militaire américain en route vers l’Europe. Une décision non justifiée officiellement et qui a été analysée comme une bouderie contre les appels de Joshua Harris.
En gros, Joshua Harris a montré le bout du nez lorsqu’il s’est confié à un média algérien (Algérie maintenant) auquel il a dit clairement que “l’escalade militaire est très dangereuse”, en référence au bellicisme du Polisario soutenu par Alger. Lui qui a réitéré le soutien américain au plan d’autonomie au journal algérien, a dit être retourné en Algérie “pour avoir une nouvelle série de consultations” avec les responsables algériens “sur les mesures pratiques à prendre pour que le processus politique de l’ONU soit couronné de succès”.
Washington plaide désormais pour la reprise des tables rondes comme le veut le Conseil de Sécurité. Un appel refusé par l’Algérie qui ne veut pas en entendre parler sous prétexte que c’est un schéma obsolète. Alger se défend par l’idée qu’il faut des négociations directes. Un argument spécieux auquel plus personne ne croit compte tenu du degré d’implication de l’Algérie dans ce différend régional. L’obstination algérienne est contrariée par les Résolutions du Conseil de Sécurité.