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Réforme de l’Ordre des Pharmaciens : Les non-dits du dernier round législatif [INTÉGRAL]


Rédigé par Anass MACHLOUKH Jeudi 13 Juillet 2023

Transmis à la Chambre des Conseillers, le projet de loi sur la réforme de l’Ordre des Pharmaciens devrait susciter encore le débat puisqu’il ne fait pas l’unanimité chez les professionnels. Détails.



Après des mois de blocage, les pharmaciens peuvent enfin entrevoir l’avenir de l’Ordre de la profession dont la réforme a été relancée dans le circuit législatif. Après avoir été voté par les députés qui ont apporté plusieurs changements au texte initial, le projet de loi 98.18, relatif à l’Ordre national des pharmaciens est désormais soumis à la loupe des membres de la Chambre des Conseillers. Les Conseillers s’apprêtent à y apporter leur touche lors de la discussion détaillée au niveau de la Commission compétente. 

Transféré le 27 juin à la deuxième Chambre, le texte a été revu de fond en comble par les députés qui ont dû rectifier plusieurs imperfections du texte apporté par le gouvernement, que les professionnels ont fortement contesté, accusant l’Exécutif de ne pas les associer dans son élaboration.
 
La réforme face à ses imperfections ! 

Bien que soigneusement amendé, le texte ne fait pas encore l’unanimité chez les professionnels, notamment les pharmaciens d’officine qui semblent encore avoir quelques réserves. Ces réserves émanent du camp des pharmaciens syndiqués. Contactés par nos soins, des membres de la Confédération des syndicats de pharmaciens du Maroc ont reconnu que le texte voté par les députés a pris en compte plusieurs doléances des pharmaciens, mais la nouvelle architecture institutionnelle est, à leurs yeux, incompréhensible. 

Selon le Secrétaire général de la Confédération, Amine Bouzoubaâ, le problème se pose au niveau de la Commission permanente de la concertation et l’accompagnement qui a été créée dans cette nouvelle loi en plus d’un Conseil central pour les pharmaciens d’officine. 
En effet, cette commission a été créée en vertu de l’article 71 du projet de loi et vient s’incruster dans la structure de l’Ordre. Dotée d’une compétence consultative, cette commission est habilitée à donner ses appréciations et étudier l’ensemble des sujets relatifs à la profession et aux intérêts de l’Ordre des Pharmaciens. Cela dit, cette commission est appelée à faire des recommandations destinées à améliorer l’exercice de la profession, comme elle peut se prononcer sur les textes législatifs et réglementaires qui régissent la profession. 

Plus important encore, il est du ressort de cette commission d’initier des procédures de médiation et de conciliation en cas de différends entre les conseils sectoriels de l’Ordre. Ce dernier, rappelons-le, est constitué de plusieurs conseils, à savoir ceux des régions des pharmaciens d’officines, ceux des répartiteurs, des biologistes, des grossistes, en plus du Conseil central.  Tous ces conseils sont représentés au niveau du Conseil national à raison de deux représentants pour chaque secteur. 
 
Les réserves des pharmaciens d’officine 

La mise en place de cette commission demeure mal vue par les pharmaciens d’officine. Ils y voient une invention inutile qui risque de compliquer davantage le fonctionnement de l’Ordre. « On craint que cette nouvelle architecture institutionnelle crée un chevauchement de compétences et des tensions dont nous n’avons pas besoin, au sein de l’Ordre », explique M. Bouzoubaâ à ce sujet. 

Comme stipulé dans le projet de loi, tel que voté par les députés, le Conseil central des pharmaciens d’officine et la commission consultative permanente partagent plusieurs prérogatives. Les deux organes ont la possibilité d’émettre des recommandations et de mener des médiations. D’où la crainte de l’enchevêtrement des compétences que redoutent les professionnels interrogés par nos soins.  Pour sa part, Amine Bouzoubaâ craint le scénario d’un « Ordre à deux têtes ». 

« De notre point de vue, les membres de cette commission, tels que définis dans la loi, ne sont pas forcément des gens qui connaissent le terrain », poursuit notre interlocuteur. Si les pharmaciens inquiets récusent ce schéma, c’est parce qu’ils estiment qu’il n’existe nulle part dans les autres instances régulatrices des autres professions. Raison pour laquelle ils appellent à ce que cette problématique soit résolue lors de l’examen du projet de loi à la Chambre des Conseillers.  

Par ailleurs, la nouvelle loi est très attendue sur l’épineuse question de l’élection du président du Conseil de l’Ordre, dont le mode proposé dans le texte initial fut très contesté. 
Certes, les amendements apportés par les députés rassurent les professionnels. Sauf qu’ils sont nombreux à ne pas être d’accord avec la limitation des mandats. En fait, le projet de loi stipule que le président du Conseil ne peut émaner d’un seul secteur de la pharmacie au-delà de deux mandats successifs. Par exemple, un président issu des pharmaciens officine ne peut briguer un troisième mandat même s’il a de fortes chances de gagner le scrutin. Le principe d’alternance est exigé entre les secteurs de telle sorte que la présidence soit tournante. Là, certains pharmaciens d’officine y voient une sorte « d’entorse » à la démocratie sous prétexte que la loi ne doit pas empêcher un secteur de présenter un candidat à la présidence. (Voir les trois questions). 

Jusqu’à présent, le projet de loi continue son circuit législatif. La discussion détaillée n’a pas encore été programmée en commission dans la deuxième Chambre. Le débat s’annonce moins impétueux qu’en première Chambre vu que la majeure partie des propositions des professionnels a été prise en compte dans les amendements déposés par les députés. Pour leu part, les pharmaciens mécontents espèrent que le passage du texte à la Chambre des Conseillers sera une occasion pour réajuster l’architecture institutionnelle de l’Ordre dont la réforme traîne depuis des années. Pour rappel, le Conseil national de l’Ordre n’a pas tenu d’élections depuis 2019, chose qui aurait impacté le fonctionnement du Conseil national dont les membres sont considérés comme illégitimes aussi bien par les syndicats que par le ministère de tutelle. Pour cette raison, la réforme est jugée vitale pour que les élections soient tenues le plus vite possible.  
 
 

Trois questions à Mohammed Amine Bouzoubaâ « La Commission qu’on a ajoutée ne fera que perturber le travail des Conseils de l’Ordre »

Amine Bouzoubaa, Secrétaire général de la Confédération des syndicats de pharmaciens du Maroc, a répondu à nos questions.
Amine Bouzoubaa, Secrétaire général de la Confédération des syndicats de pharmaciens du Maroc, a répondu à nos questions.

-Pourquoi l’alternance de la présidence du Conseil national vous est-elle problématique au point de dire qu’elle est antidémocratique ?

Je tiens d’abord à rappeler que le projet de loi, tel que voté par la première Chambre a été plus clair que celui initial puisque le mode d’élection du président du Conseil national a été clarifié. Le mode de scrutin nous paraît correct et conforme à ce qui se fait dans d’autres pays. Sauf que le président de l’Ordre ne peut briguer un troisième mandat. Cela signifie que chaque secteur de la pharmacie n’a pas le droit de présenter un candidat à la présidence de l’Ordre si le président sortant appartient à ce même secteur. 
A nos yeux, ceci n’est pas souhaitable puisqu’il faut laisser fonctionner la démocratie. Je rappelle que les pharmaciens d’officine constituent le noyau dur de la profession avec 12.000 professionnels contre 500 pharmaciens biologistes, alors que les industriels ne dépassent pas 60 professionnels.

-Comment donc s’assurer que tous les secteurs ont les mêmes chances d’accéder à la présidence ?

Cette obligation d’alternance est un cadeau indu donné aux secteurs minoritaires. Il nous parait incompréhensible qu’un secteur de 50 personnes puisse gouverner un secteur de 12.000 pharmaciens. Donc, nous plaidons pour un scrutin qui donne la voix à la majorité sans conditions restrictives. On peut, par exemple, songer à un mode proportionnel qui garantit une représentativité équitable de tous les secteurs dans le Conseil national tout en laissant l’élection du président ouverte au scrutin majoritaire à tous les candidats sans exception.

-Le projet de loi est désormais sous la loupe des Conseillers, quelles sont les recommandations que vous comptez exprimer ?
Pour nous, en plus de la révision de la question de limitation des mandats du président, nous sommes attachés au retrait de la Commission consultative qui, de notre point de vue, n’a pas de place dans l’Ordre des pharmaciens et ne sera qu’un facteur de blocage du travail des conseils sectoriels.
 

Avenir de la profession : Pourquoi cette réforme est-elle si nécessaire ?

En fait, le ministère de la Santé a besoin d’un interlocuteur crédible avec lequel il puisse parler et négocier les aspects relatifs à la régulation de la profession et l’élaboration des textes législatifs. Toutefois, il ne faut pas confondre le rôle de l’Ordre avec celui des syndicats qui ont une vocation tout à fait différente. « Les Syndicats ont pour vocation de défendre les intérêts matériels des pharmaciens », précise Amine Bouzoubaâ.

La refonte de l’Ordre intervient à un moment important où la profession est en quête de développement. Depuis la pandémie, les pharmaciens revendiquent que la profession soit reconsidérée. Raison pour laquelle ils réclament de nouvelles prérogatives et que le pharmacien soit associé à la réforme du système de Santé.

A titre d’exemple, ces derniers revendiquent le droit de substitution des médicaments, qui leur parait nécessaire. De même, ils veulent qu’il leur soit octroyé le droit de faire des prestations médicales de base au niveau des officines comme l’administration des vaccins. A cela s’ajoute d’autres revendications liées aux marges bénéficiaires des médicaments. Cela dit, sans un Ordre qui fonctionne, toute discussion avec le ministère de tutelle sur ces sujets ne peut voir le jour. 
 

L’info...Graphie


Conseils régionaux des Pharmaciens d’officine : Enfin le déblocage électoral

Pendant que le projet de loi 98.18 relatif à l’Ordre National des Pharmaciens traînait au Parlement à cause des multiples reports du dépôt d’amendements, les syndicats des pharmaciens d’officine haussaient le ton pour réclamer le déblocage des élections de leurs Conseils régionaux. Ces derniers ont multiplié les sit-in à Rabat et à Casablanca afin de faire entendre leur voix. Pour sa part, le ministère de la Santé et de la Protection sociale a tenté de résoudre le problème parce qu’il fallait absolument que ces élections soient tenues le plus tôt possible afin de renouveler les conseils actuels qui ne sont plus légitimes et sont incapables d’être un interlocuteur assez crédible pour défendre les intérêts de cette catégorie. 

Le gouvernement a adopté un projet de décret-loi édictant des dispositions relatives à l'organisation des élections des Conseils régionaux des pharmaciens du Nord et du Sud. Un texte dont le but est d’encadrer ces élections en attendant que la réforme de l’Ordre soit votée par le Parlement et ensuite promulguée et publiée dans le Bulletin Officiel.

Le texte, adopté par l’Exécutif le 16 mars, contient plusieurs dispositions spécifiques destinées à régir les élections. Une tâche dévolue à une « commission administrative spéciale » qui sera constituée à cet effet en vertu de la loi, dont le siège élira domicile à Rabat. En effet, le président et les membres de la commission seront nommés par décret qui fixera également la date du début de ses fonctions. Ils seront nommés par le Chef du gouvernement sur proposition du ministre de la Santé.

Il incombe à la Commission de fixer la date des élections des deux Conseils régionaux et de désigner les lieux du scrutin, selon l’article 4 de la loi, qui exige que l’annonce des élections fasse l’objet d’une communication officielle trente jours avant la date préalablement fixée.








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