L'Opinion Maroc - Actuali
Consulter
GRATUITEMENT
notre journal
facebook
twitter
youtube
linkedin
instagram
search



Actu Maroc

Opticiens-lunettiers : Longue perte d’éclat d’une brillante profession [INTÉGRAL]


Rédigé par Omar ASSIF Dimanche 4 Juin 2023



Les myopes vous le diront : vivre sans lunettes n’est pas une chose facile. Les chiffres que nous avons pu recouper évoquent un taux de 20% de la population marocaine qui a besoin de porter des lunettes au quotidien. C’est-à-dire que plus de 7.4 millions de Marocains constituent des clients potentiels pour le marché national de l’optique. D’autres chiffres évoquent un chiffre d’affaires qui se situe entre 2 et 5 milliards de dirhams par an pour ce secteur paramédical. Au vu des avancées technologiques et aux effets de mode qui rythment la profession d’opticien, il est tout à fait logique de penser que ce corps de métier se porte à merveille. Il suffit pourtant d’échanger avec les opticiens pour constater que l’illusion d’optique est réelle. « Durant ces trois dernières décennies, le métier d’opticien au Maroc a vécu une longue déchéance qui ternit son image, dégrade la valeur du travail fourni par les praticiens sérieux et engagés et surtout met en danger la santé et l’intérêt du grand public », martèle Firass Ouahi, opticien installé à Rabat depuis les années 80.

Loi et diplôme

Le praticien pointe la prolifération de profils étrangers au métier qui, pourtant, se revendiquent opticiens sans disposer des prérequis nécessaires. « C’est une situation qui existe ou a existé dans le passé dans d’autres pays, mais le manque d’initiative des autorités concernées au Maroc a fait qu’il existe actuellement plus de bricoleurs que d’opticiens de métier », poursuit notre interlocuteur qui évoque des magasins de « vente et réparation de lunettes » qui se sont arrogé le droit d’exécuter des ordonnances. « Ce qui a encore plus exacerbé cette situation anarchique est le fait des écoles privées qui ont été autorisées à ouvrir leurs portes et facilitent l’obtention de diplômes dans des conditions très douteuses », surenchérit M. Ouahi. Une situation d’autant plus aberrante que le Dahir qui régissait le métier d’opticien et qui n’est toujours pas abrogé exige la nécessité de justifier d’un diplôme d’Etat (ou titre équivalent). Un sésame que seule la Faculté de Cadi Ayyad est actuellement en condition légale de pouvoir donner.

La déferlante chinoise

« Les différences que l’on peut constater entre les prix des montures sont phénoménaux. Il en va de quelques centaines, voire de dizaines, de dirhams dans certains magasins populaires à plusieurs milliers de dirhams chez certaines enseignes chics d’optique », témoigne un client qui doit régulièrement renouveler son équipement optique.

« Une monture qui est fabriquée en respectant un cahier de charges de qualité et de sécurité doit obligatoirement coûter un peu plus cher qu’une monture dont le fabriquant n’a respecté aucune norme. Ce qui n’empêche pas que l’offre de lunettes économiques de qualité et à des prix très bas est disponible chez la majorité des opticiens grâce aux efforts consentis par le syndicat et certains fournisseurs.

Ce qui est étrange, c’est plutôt que l’Etat marocain tolère encore que le marché informel soit inondé de montures de contrefaçon ou encore de très mauvaise qualité », estime Firass Ouahi qui admet cependant que le contrôle des importations de verres optiques et de lentilles de contact est « beaucoup plus strict ».

Rendre justice à la profession

« Il y a quelques années, il y avait trois métiers paramédicaux qui nécessitaient un accompagnement pour améliorer leur cadre légal : les infirmiers, les sage-femmes et les opticiens. Alors que les deux premiers ont pu bénéficier d’une loi qui a renforcé leurs corps de profession, les opticiens ont malheureusement été classés dans le giron des métiers qui ne sont pas réglementés », raconte Firass Ouahi.

Un arbitrage qui a participé à l’anarchie que connaît ce secteur pourtant très porteur et d’une importance vitale pour la santé visuelle des Marocains. « J’espère que les décideurs et les autorités concernées pourront rapidement prendre conscience de l’ampleur de la problématique que vit notre métier et lui rendre justice. La profession d’opticien n’a pas à subir les médiocres décisions qui ont été prises par le ministère de la Santé et le Secrétariat Général du Gouvernement.

Il faut à mon sens l’honorer par une loi digne des aptitudes des opticiens puis opérationnaliser cette loi par palier afin d’assainir ce marché et protéger la santé des citoyens », conclut l’opticien.
 
Omar ASSIF
 

3 questions à Mina Ahkim ​« Malheureusement, le pessimisme ne cesse de croître parmi les professionnels »

Elue en 2018 en tant que présidente du Syndicat Professionnel National des Opticiens du Maroc, Mme Mina Ahkim répond à nos questions sur l’évolution de ce métier au niveau national.
Elue en 2018 en tant que présidente du Syndicat Professionnel National des Opticiens du Maroc, Mme Mina Ahkim répond à nos questions sur l’évolution de ce métier au niveau national.
Comment ont évolué la formation et le métier d’opticien au Maroc à travers l’Histoire ?

- L'Histoire de l'optique au Maroc débute dans les années 1930, avec l'installation de quelques opticiens français. Par la suite, en 1954, un Dahir chérifien a été instauré, faisant de l'optique la première profession paramédicale réglementée au Maroc. Avant 1997, les opticiens marocains étaient formés dans des pays européens. Depuis 1994, la formation en optique et en optométrie s'est établie au sein de la Faculté Cadi Ayyad à Marrakech.

Quelle est la situation du métier actuellement en termes de nombre de praticiens à l’échelle nationale ?

- Au cours des dernières années, le secteur a connu une explosion du nombre de professionnels, passant de 900 opticiens en 2010 à 5500 en 2023, et cette tendance est à la hausse. Si ce rythme se maintient, nous pourrions compter pas moins de 15.000 opticiens dans moins de 10 ans.

Quelle sont votre perspective future et celle des opticiens marocains par rapport à leur métier ?

- Malheureusement, le pessimisme ne cesse de croître parmi les professionnels. Le non-respect de la loi prime. La santé visuelle du citoyen est en danger à cause des montures et des verres de qualité inférieure qui sont de plus en plus présents sur le marché informel et sur Internet, et de fausses campagnes médicales qui se multiplient dans le pays sans aucune intervention des autorités. L'explosion du nombre de praticiens en si peu d'années ne facilite pas les choses, le nombre de clients par opticien ne cesse de diminuer.

Compétences : Les multiples savoir-faire du métier d’opticien-lunettier

Dans le cadre de son activité libérale, l’opticien accompli est le plus souvent celui qui a pu s’installer à son compte et prospérer tout en maîtrisant les multiples facettes de son métier. Au-delà d’être un simple marchand de lunettes, l’opticien est un entrepreneur qui sait gérer son officine, son stock et sa clientèle.

Ainsi, la première condition pour réussir dans cette carrière est d’avoir une bonne organisation et des connaissances suffisantes en gestion de l’entreprise. L’opticien est également un commercial qui est souvent en contact avec une clientèle qui a besoin de conseil et de produits adaptés à ses goûts et à son porte-monnaie.

Il doit ainsi faire preuve d’un bon sens de la communication, tout en mettant à profit un marketing adapté. Enfin, l’opticien se doit également d’être un bon technicien, capable de tailler des verres puis de les monter dans une monture, d’adapter des lentilles de contact ou encore de vérifier une réfraction. Dans certains cas, l’opticien peut également ajouter des instruments d’optique à son offre de produits.

 

L’info...Graphie


Formation : Le besoin de formation face à une évolution rapide des technologies

A l’instar d’autres secteurs d’activités qui font appel à des équipements de pointe, la profession d’opticien fait face à une évolution rapide des technologies et des produits que ses praticiens utilisent. Que ce soit en termes de techniques de fabrication des montures, des traitements appliqués aux verres optiques, des matériaux utilisés dans les lentilles de contact ou du matériel utilisé pour la lunetterie et l’optométrie, les opticiens au Maroc, comme ailleurs, se doivent de rester à jour concernant les dernières nouveautés.

Alors qu’une grande partie des opticiens marocains devaient par le passé faire le déplacement dans d’autres pays pour bénéficier de formations sur les dernières techniques et technologies, une société marocaine spécialisée en conseil et communication dans le domaine de l’optique a depuis quelques années organisé « l'Optical Roadshow Academy » afin de mettre ce genre de formations à disposition des praticiens, au niveau régional. La société Média Optique propose ainsi « des séminaires et des formations pour les professionnels de l'optique afin de les aider à améliorer leurs compétences et leur expertise ».

Elle fait appel à des experts nationaux et internationaux afin d’animer des ateliers thématiques qui touchent à plusieurs disciplines liées à la profession d’opticien. A noter que cette société édite depuis plusieurs années un portail électronique et une revue professionnelle gratuite « Maroc Optique » qui est distribuée par intermittence au niveau des points de vente d’opticiens au niveau national.








🔴 Top News