La région arabe est extrêmement vulnérable au changement climatique, ce qui affecte gravement ses systèmes alimentaires et leur capacité à fournir des aliments sûrs et nutritifs de manière durable et inclusive. Malgré cette urgence, la région ne reçoit pas un financement climatique suffisant. C’est ce qui ressort d’un récent Policy Brief, publié par la Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale(CESAO ou ESCWA en anglais), relevant du Conseil économique et social des Nations Unies.
Intitulé «Les flux de financement climatique vers les systèmes alimentaires dans la région arabe», le document souligne que la région arabe a reçu, sur la période 2013-2022, un total de 43 milliards de dollars en financement avec un objectif climatique principal. Parmi cela, 5,2 milliards de dollars ont été spécifiquement alloués aux systèmes alimentaires. L'essentiel de ce financement (68%) était destiné à l'adaptation, 15% à l'atténuation, et le reste aux projets combinant les deux objectifs.
Par ailleurs, en 2022, la région a reçu 10,2 milliards de dollars en financement climatique public international, dont 2,1 milliards de dollars ont été dirigés vers les secteurs des systèmes alimentaires.
En outre, l'allocation des subventions pour les systèmes alimentaires entre 2013 et 2022 montre que sur les 2,2 milliards de dollars de subventions reçues, environ 800 millions de dollars (38%) ont été spécifiquement dédiés au soutien de la production et de la consommation alimentaire. Le reste des subventions a été dirigé vers d'autres sous-secteurs comme l'environnement, la foresterie, la gestion de l'eau et le développement rural.
Le Maroc, un modèle de réussite climatique
D’autre part, la répartition du financement climatique par pays entre 2013 et 2022 révèle que le Maroc a été le principal bénéficiaire de la région, réussissant à capter une enveloppe financière substantielle d'environ 2 milliards de dollars spécifiquement alloués au renforcement de ses systèmes alimentaires. Ce montant représente une part colossale de 38% du total des fonds distribués à cette fin dans la région euro-méditerranéenne, affirmant ainsi la position prépondérante du Maroc.
Cette réussite spectaculaire n'est en aucun cas fortuite. Le document attribue explicitement la capacité du Maroc à attirer ces financements à sa "préparation au financement climatique", évaluée comme particulièrement favorable. Avec un score de 0,432 et un classement honorable au 87ème rang mondial parmi l'ensemble des pays en développement en termes de préparation, le Royaume démontre une maturité institutionnelle, une gouvernance environnementale robuste et une vision claire quant à ses objectifs climatiques. Cette préparation englobe la mise en place de cadres politiques et réglementaires adaptés, la transparence dans la gestion des fonds et une capacité avérée à élaborer des propositions de projets solides et bancables.
Les clés du succès
Plusieurs facteurs fondamentaux expliquent cette performance exemplaire. Le rapport met en évidence la volonté inébranlable du Maroc de développer et de mettre en œuvre des approches stratégiques d'adaptation, à la fois innovantes et rigoureusement planifiées. L'attention particulière portée au secteur agricole et aux zones rurales illustre cette démarche pragmatico-économique. Consciente de sa vulnérabilité aux aléas climatiques (sécheresses récurrentes, inondations), l'agriculture marocaine bénéficie d'investissements ciblés pour renforcer sa résilience, à travers des pratiques durables (agriculture de conservation, gestion efficiente de l'eau), l'efficacité de l'irrigation (goutte-à-goutte) et la diversification des cultures résistantes au climat, garantissant ainsi la sécurité alimentaire et la subsistance des populations dépendantes de ce secteur vital.
Parallèlement, le Royaume s'est activement engagé dans la promotion de projets d'atténuation des gaz à effet de serre. Cela se traduit par des initiatives concrètes visant la transition énergétique, le développement massif des énergies renouvelables (avec des parcs solaires et éoliens de grande envergure) et l'amélioration de l'efficacité énergétique dans les secteurs industriel et résidentiel. Ces efforts ne contribuent pas seulement à la réduction de l'empreinte carbone nationale, mais ouvrent également de nouvelles opportunités économiques, créent des emplois verts et favorisent le transfert de technologies innovantes. L'attractivité du Maroc pour les investisseurs est également renforcée par sa capacité avérée à attirer des investissements du secteur privé. Le rapport insiste sur ce point, car la mobilisation du capital privé est indispensable pour combler l'écart de financement climatique et accélérer la transition vers une économie bas-carbone. Le Maroc a su créer un environnement propice à ces investissements, en offrant des incitations fiscales, en simplifiant les procédures administratives et en assurant une stabilité réglementaire qui rassure les partenaires économiques.
Enfin, une dimension cruciale soulignée par le document est l'intégration systématique des questions de genre, d'environnement et sociales dans la conception et l'exécution de l'ensemble des projets. Cette approche holistique garantit que les initiatives climatiques ne se contentent pas de bénéfices purement environnementaux, mais qu'elles contribuent également à l'équité sociale, à l'autonomisation des femmes (souvent en première ligne des impacts climatiques en milieu rural) et à la protection de la biodiversité. Cette vision intégrée renforce la légitimité, l'acceptation locale et l'impact à long terme des actions climatiques marocaines, en assurant que personne n'est laissé pour compte dans la transition.
En conclusion, le rapport présente le Maroc non seulement comme un bénéficiaire efficace des financements climatiques, mais surtout comme un modèle inspirant pour ses pairs du voisinage Sud.
A. CHANNAJE
Le Royaume, un exemple de leadership climatique
Le Maroc s'affirme comme un leader régional et international de l'action climatique. C'est la conclusion unanime des participants à une table ronde organisée récemment à Rabat, marquant le 10ème anniversaire de la signature de l'Accord de Paris sur le climat. Initiée par le ministère de la Transition énergétique et du Développement durable, en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), cette rencontre a permis de mettre en lumière les avancées significatives du Royaume.
Nathalie Fustier, coordinatrice résidente des Nations Unies au Maroc, a chaleureusement salué le leadership et les efforts soutenus du Maroc dans la lutte contre le changement climatique. Elle a souligné les "pas remarquables" franchis par le Royaume depuis son adhésion à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, témoignant d'un engagement durable et d'une mobilisation multisectorielle exemplaire. La CDN 2.0 du Maroc reflète un haut niveau d'ambition, celui-ci salué internationalement pour son alignement clair avec l'objectif de l'Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.
Le leadership du Royaume est particulièrement éloquent dans le domaine de la transition énergétique. "La stratégie énergétique du Maroc figure parmi les stratégies les plus ambitieuses de la région MENA. Elle vise à atteindre 52% d'énergies renouvelables dans le mix électrique et à améliorer l'efficacité énergétique de 20% d'ici à 2030", s'est félicitée Mme Fustier. Elle a également mis en avant la montée en puissance des capacités nationales institutionnelles, juridiques, techniques et opérationnelles, permettant au Maroc de concrétiser ses engagements climatiques de manière cohérente et structurée. Les choix audacieux, les politiques intégrées et la vision à long terme du Maroc en font un véritable modèle à suivre en matière de gouvernance climatique.