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Maroc-Mauritanie: Les enjeux du front mauritanien


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mercredi 26 Mai 2021

En pleine brouille diplomatique entre le Maroc et l’Espagne, Rabat et Nouakchott veulent établir un véritable partenariat économique. Une aspiration commune, partagée par les chefs d’Etat des deux pays, qui sera concrétisée à l’aide d’une commission mixte.



Au moment où la crise entre Madrid et Rabat bat son plein à cause de l’affaire Ibrahim Ghali et les troubles migratoires à Sebta, le Maroc semble revoir ses cartes, en renforçant ses relations avec son voisin du Sud. Etat sensible comme stratégique pour la diplomatie marocaine, la Mauritanie ne manquerait pas de devenir une composante importante de la politique de partenariat économique avec l’Afrique subsaharienne. Pays voisins aux intérêts communs, le Maroc et la Mauritanie sont déterminés à renforcer leur coopération économique, en passant à la vitesse supérieure. C’est le message qu’est venu annoncer le ministre mauritanien des Affaires étrangères Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, qui effectue une visite officielle au Maroc. Une occasion pour réfuter toutes les fake news parlant d’une potentielle crise entre les deux pays, suite au report de cette visite, en avril, pour des raisons sanitaires.

Affermir le business encore faible

Lors d’une conférence de presse, tenue en marge de son entretien avec son homologue marocain Nasser Bourita, le chef de la diplomatie mauritanienne a souligné l’excellence des relations bilatérales, tout en faisant part de l’ambition de son pays de pousser la coopération économique et commerciale au plus haut niveau. « Les relations économiques ne sont pas à la hauteur de l’excellence des relations politiques », a précisé Ould Cheikh, annonçant la tenue prochaine de la commission mixte, qui sera désormais présidée par les chefs du gouvernement des deux pays, en vue de répondre aux aspirations communes d’accélérer le partenariat dans plusieurs domaines.

Cette aspiration est partagée par le gouvernement marocain. Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération africaine Nasser Bourita a également insisté sur la nécessité de booster la coopération économique entre Rabat et Nouakchott, afin de concrétiser la vision commune de SM le Roi et du président mauritanien Mohammed Ould El Ghazouani. Le chef de la diplomatie marocaine a annoncé que les préparatifs sont d’ores et déjà entamés pour la tenue de la commission mixte qui se penchera sur la mobilisation des acteurs économiques des deux pays afin d’examiner le potentiel de partenariat économique multisectoriel.

Une relation forte malgré le contexte régional difficile

Lors de son allocution, Nasser Bourita n’a pas manqué de balayer d’un revers de main les différentes fake news qui tentent de faire croire qu’il existe une crise entre le Maroc et la Mauritanie, en prévenant à ne pas « pêcher dans les eaux troubles ». En effet, plusieurs médias algériens et quelques sources de presse, aux agendas ambigus, ont spéculé sur une potentielle « crise diplomatique » entre les deux pays. Ces élucubrations trouvent dans le contexte régional difficile un terrain propice pour prospérer. Le dossier du Sahara reste l’un des sujets les plus épineux à discuter entre les deux pays, la position de la Mauritanie reste tout de même imprévisible, Nouakchott reconnaît toujours le Polisario, sachant que ses dirigeants se rendent régulièrement dans ce pays. Pourtant, la venue au pouvoir de l’actuel président Ould El Ghazouani pourrait changer l’état actuel des choses, son gouvernement semble plus enclin à la coopération avec le Maroc et y accorde une attention particulière. Cela s’est avéré durant la crise d’El Guerguerat où la Mauritanie a pris conscience de l’importance d’un partenariat durable avec Rabat, après avoir subi les conséquences fâcheuses du blocage du poste frontalier par les milices du Polisario.
 

3 questions à Mohammed Maelaïnin

« Le nouveau président mauritanien est radicalement différent de son prédécesseur »
Mohammed Maelaïnin, diplomate, ancien ambassadeur du Maroc dans plusieurs pays, dont l’Australie et l’Argentine, a répondu à nos questions sur la visite du chef de la diplomatie mauritanienne au Maroc et sur le futur partenariat économique entre les deux pays.

Le Maroc et la Mauritanie veulent désormais coopérer économiquement plus fort que jamais, comment lisez-vous cette détermination qui s’est manifestée tout d’un coup ?

• En général, les relations entre les deux pays sont d’une sensibilité extrême à l’égard de plusieurs facteurs historiques et politiques. Selon mon point de vue, il faut être très positif quant à ces nouvelles annonces et s’abstenir de ressortir les anciennes positions. Il faudrait surtout vanter les mérites de l’actuel Président et de son ministre des Affaires étrangères. Grâce à un véritable partenariat économique, la Mauritanie peut devenir la plaque tournante et une liaison entre le Maroc et les pays d’Afrique subsaharienne enclavés, tels le Mali, le Burkina Faso, le Niger et même d’autres pays de la côte Ouest de l’Afrique.

 • Les deux ministres ont dit qu’ils veulent renforcer la coopération économique qui n’est pas à la hauteur des rapports politiques, est-ce là un indice positif pour la position de la Mauritanie dans l’affaire du Sahara ?

• J’ai vu la déclaration du ministre mauritanien où il a dit que la conversation téléphonique qui a eu lieu entre SM le Roi et le président a été fructueuse. C’est intéressant de constater qu’une nouvelle ère semble commencer sous l’actuel président mauritanien, qui a l’air sérieux dans sa volonté de coopérer avec le Maroc.

• Les relations ont connu des fluctuations ces dernières années, parfois des ambiguïtés, qu’est-ce qui explique ce manque de visibilité entre les deux pays qui ont pourtant toujours déclaré vouloir coopérer ?

• Contrairement à l’actuel président, son prédécesseur Mohamed Ould Abdel Aziz semait toujours de l’ambiguïté. Il était imprévisible et ne voulait pas asseoir une stratégie régionale où le Maroc et la Mauritanie sont les têtes de lance. Il aimait valser. Maintenant, on assiste à un revirement de la situation.