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Le Maroc scelle une convention énergétique de 5 GW : un investissement stratégique pour l’économie verte à l’horizon 2030


Rédigé par Dr LARAKI Khalid, Expert de l'AIEA le Jeudi 6 Novembre 2025

Dans un contexte mondial caractérisé par la transition énergétique accélérée et la volatilité persistante des marchés des hydrocarbures, le Royaume du Maroc franchit une étape décisive vers l’autonomie énergétique et la consolidation de sa souveraineté industrielle. La récente signature, le 3 novembre 2025 à Rabat, d’une convention majeure portant sur le développement de 5 gigawatts (GW) d’électricité verte illustre parfaitement cette dynamique stratégique.



Le Maroc scelle une convention énergétique de 5 GW : un investissement stratégique pour l’économie verte à l’horizon 2030

Cette initiative, présidée par le Chef du gouvernement Aziz Akhannouch et réunissant l’État, l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE), l’Agence marocaine pour l’énergie durable (MASEN) et l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État (ANGSPE), marque un tournant significatif pour le Royaume. Elle se situe à l’intersection de trois impératifs : la souveraineté énergétique, la compétitivité industrielle et la promotion d’une croissance durable et résiliente.

L’objectif principal de cette convention est clair et ambitieux : porter la capacité installée en énergie renouvelable jusqu’à 5 GW d’ici 2030, afin de sécuriser l’approvisionnement énergétique du tissu productif national et de réduire de manière substantielle la facture énergétique extérieure du pays.

Au-delà de l’aspect purement technique, cette convention incarne une inflexion stratégique majeure. Elle conjugue transition énergétique et performance économique, en s’inscrivant dans une logique d’investissement structurant, d’optimisation des ressources publiques et privées, et de création de valeur durable à long terme.
 

Un investissement de plusieurs milliards pour une énergie compétitive


Selon les premières estimations, le développement des 5 GW d’électricité renouvelable nécessitera un investissement global évalué entre 60 et 80 milliards de dirhams, mobilisant à la fois des ressources publiques et des capitaux privés. Cette enveloppe considérable sera prioritairement consacrée à la construction de nouvelles centrales solaires et éoliennes, à la modernisation du réseau de distribution électrique, ainsi qu’à l’intégration de solutions de stockage et de régulation permettant une exploitation optimale des ressources renouvelables.

Le modèle de développement adopté repose sur une approche multi-acteurs, dans laquelle MASEN et l’ONEE assureront le rôle de bras publics structurants, garantissant la cohérence stratégique et la sécurité des investissements. Parallèlement, les opérateurs privés seront mobilisés par le biais de partenariats public-privé (PPP) et de mécanismes de financement mixtes, favorisant la complémentarité entre capitaux publics et privés.

De son côté, l’État entend rationaliser sa participation financière, en tirant parti de la mutualisation des infrastructures et de la centralisation stratégique pilotée par l’ANGSPE, afin de maximiser l’efficacité économique et d’assurer une maîtrise durable des coûts énergétiques pour le pays.
 

Un levier stratégique pour stabiliser les coûts énergétiques et renforcer la compétitivité industrielle


L’un des principaux instruments économiques de cette convention réside dans la maîtrise durable du coût de l’énergie. Actuellement, le Maroc dépend encore fortement des importations d’hydrocarbures, exposant son économie aux aléas des marchés internationaux et aux fluctuations imprévisibles des prix.

En produisant localement une électricité issue de sources renouvelables, le Royaume entend réduire cette dépendance, assurer une stabilisation du coût du kilowattheure pour les entreprises et renforcer la prévisibilité des charges énergétiques pour l’ensemble du secteur industriel. Cette sécurité énergétique constitue un facteur déterminant de compétitivité, notamment pour les filières à forte valeur ajoutée et à vocation exportatrice telles que l’automobile, l’aéronautique, la chimie, le textile ou encore l’industrie des phosphates, confrontées à une concurrence internationale accrue et à des exigences croissantes en matière de décarbonation.

L’accès à une énergie verte, abordable et fiable confère ainsi au “Made in Morocco” un avantage comparatif stratégique, en alignant performance industrielle, durabilité et souveraineté énergétique.
 

MASEN et ONEE : une complémentarité clarifiée pour une efficacité accrue


La convention établit de manière explicite les rôles respectifs de MASEN, opérateur dédié au développement des énergies renouvelables, et de l’ONEE, gestionnaire du réseau national et garant de la distribution de l’électricité. Cette clarification, attendue de longue date par les investisseurs et bailleurs de fonds, met fin aux chevauchements institutionnels qui pouvaient ralentir la mise en œuvre des projets.

MASEN se concentrera sur la conception, le montage financier et la réalisation des projets, en mobilisant partenariats privés et instruments de financement innovants. L’ONEE, quant à elle, assurera l’exploitation des infrastructures et l’intégration optimale de l’électricité produite au sein du réseau national.

Cette répartition des responsabilités permettra une meilleure visibilité sur les flux financiers, une réduction significative des coûts de coordination et une accélération des délais de réalisation. Elle constitue un gage de transparence et de sécurité pour l’ensemble des acteurs impliqués, renforçant ainsi l’attractivité du secteur des énergies renouvelables au Maroc et consolidant la crédibilité du Royaume sur la scène internationale de l’investissement énergétique.
 

Un cadre financier stable et attractif pour les investisseurs


Le gouvernement marocain s’engage à offrir un environnement contractuel prévisible et des conditions propices à l’investissement privé. Cette démarche s’inscrit dans la volonté de consolider la confiance des investisseurs et d’assurer la pérennité des projets d’énergie renouvelable.

Parmi les mesures mises en œuvre : la mise en place de tarifs incitatifs et stables pour l’achat d’électricité verte, la possibilité de conclure des contrats d’achat à long terme (Power Purchase Agreements, PPA) pour les industriels, ainsi que la simplification des procédures d’autorisation et de raccordement au réseau.

Ces dispositifs visent à attirer des investisseurs institutionnels de premier plan, tels que les fonds souverains, les banques de développement et les fonds d’infrastructure, tout en favorisant l’intégration de la finance verte dans les portefeuilles nationaux.

Fort de son expérience pionnière en matière de finance climatique, le Maroc ambitionne également d’accroître son accès aux mécanismes internationaux de financement de la transition énergétique et de la compensation carbone, mis en place par la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et l’Union européenne.

Ce cadre financier stable et transparent constitue un levier déterminant pour mobiliser les capitaux nécessaires à l’atteinte des objectifs de 5 GW d’électricité verte d’ici 2030, tout en garantissant la viabilité économique et la rentabilité des projets à long terme.
 

Un impact macroéconomique structurant


Le développement de 5 GW supplémentaires d’électricité renouvelable au Maroc constitue un moteur significatif de croissance économique et de transformation industrielle. Les retombées attendues se déclinent sur plusieurs dimensions :

  • Croissance du PIB : l’investissement massif dans les infrastructures énergétiques devrait générer jusqu’à un point de croissance additionnelle sur la période 2026-2030, contribuant ainsi à la dynamisation de l’économie nationale.
  • Création d’emplois : plusieurs dizaines de milliers d’emplois directs et indirects seront créés, notamment dans les secteurs de la construction, de la maintenance, de l’ingénierie et de la fabrication d’équipements locaux.
  • Économies sur les importations énergétiques : la production domestique d’électricité verte permettra de réduire les importations d’hydrocarbures, avec une économie annuelle estimée entre 5 et 6 milliards de dirhams, renforçant la balance commerciale nationale.


Transition industrielle et compétitivité : l’accès à une énergie verte, stable et compétitive renforcera la performance des industries exportatrices marocaines, face aux exigences croissantes de décarbonation, notamment dans le cadre du mécanisme européen d’ajustement carbone aux frontières.

Souveraineté énergétique : la part des énergies renouvelables dans le mix électrique national devrait atteindre 52 % à l’horizon 2030, consolidant l’indépendance énergétique du Royaume et sa résilience face aux fluctuations des marchés internationaux.

Ces effets combinés transforment la transition énergétique en un véritable catalyseur de développement durable, où compétitivité industrielle, création d’emplois et stabilité macroéconomique s’articulent harmonieusement avec les ambitions écologiques et stratégiques du Maroc.
 

Un projet au cœur de la vision économique royale


Aux yeux du Chef du gouvernement, cette convention s’inscrit pleinement dans la continuité de la vision stratégique portée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui érige la souveraineté énergétique en pilier central du développement national. Par cette initiative, le Maroc affirme sa volonté de conjuguer transition énergétique et renforcement de la compétitivité industrielle, tout en consolidant la stabilité macroéconomique du Royaume.

Le pays a d’ores et déjà atteint 46 % de capacité électrique installée issue des énergies renouvelables et ambitionne de dépasser 52 % à l’horizon 2030, se positionnant ainsi parmi les leaders africains du secteur énergétique. Cette trajectoire souligne l’engagement durable du Maroc en faveur d’une énergie propre, fiable et compétitive.

La signature de la convention par les ministres Nadia Fettah, Leila Benali et Fouzi Lekjaa symbolise la convergence des politiques économiques, budgétaires et énergétiques, et illustre la volonté de l’État de gérer la transition énergétique comme un véritable levier stratégique, générateur de rentabilité, de stabilité et d’emplois durables, consolidant ainsi la prospérité nationale.
 

Vers une économie énergétique intégrée et exportatrice


Fort de projets emblématiques tels que Noor Ouarzazate, Tarfaya ou Midelt, le Maroc dispose déjà d’une infrastructure énergétique robuste et performante. Le développement des 5 GW supplémentaires annoncés constituera un franchissement majeur, ouvrant la voie à une dynamique régionale et industrielle renforcée.

Cette avancée stratégique permettra :
 

  • D’accroître l’intégration régionale, en favorisant l’exportation d’électricité verte vers l’Europe et l’Afrique subsaharienne, grâce à un réseau d’interconnexions en cours de modernisation et de renforcement ;
  • De stimuler le développement d’un écosystème industriel national centré sur les technologies vertes, en encourageant la production locale d’équipements, la formation de compétences spécialisées et l’innovation dans le secteur énergétique ;


D’affirmer le Royaume comme un pôle énergétique régional de référence, capable de générer des revenus significatifs par l’exportation d’électricité propre, de technologies vertes et du savoir-faire industriel local, consolidant ainsi sa position stratégique sur le marché énergétique international.


Les chiffres clés du projet

Conclusion


Cette convention, dépassant sa seule dimension politique, constitue une décision économique profondément structurante. Elle inscrit le Maroc dans une trajectoire de croissance durable, en conciliant compétitivité industrielle, stabilité budgétaire et transition écologique.

À moyen terme, cette dynamique stratégique pourrait positionner le Royaume parmi les exportateurs d’énergie verte les plus performants de la région, particulièrement vers l’Europe, qui poursuit une décarbonation accélérée de ses économies. En s’appuyant sur l’innovation, le renforcement des partenariats industriels et la valorisation efficiente de ses ressources naturelles, le Maroc jette les bases d’un modèle de croissance verte novateur, alliant rentabilité économique, souveraineté énergétique et leadership environnemental.




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