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L’austérité tue !


Rédigé par Samir BELAHSEN le Samedi 18 Juillet 2020

La rigueur ne peut qu’aggraver la récession, écrivait Paul Krugman, Prix Nobel d’économie, dans le New York Review of Books.



Dr Samir Belahsen.
Dr Samir Belahsen.
Dans une précédente tribune, j’avais osé espérer des messages forts du PLFR, un peu d’audace politique et de volontarisme économique.
 
Pour le confiné que je suis j’étais très optimiste :
 
« Il reste que nous pensons que l’essentiel dans l’urgence est d’éclairer les acteurs économiques sur l’horizon ; nous espérons donc des signaux forts. 

Il s’agit d’abord de manifester clairement la volonté du pays de se positionner dans le monde de demain comme partenaire sérieux, ouvert et compétitif. 

Annoncer clairement, pour nous, signifie prendre des décisions du genre : une banque pour les PME, un nouveau plan émergence industrielle avec un volet spécifique pour l’agro-industrie, un arsenal pour l’export… Les mesures qui permettraient de remettre le pays au travail pour relancer l’offre relèvent de l’urgence tout comme les mesures sociales pour maintenir la paix sociale et relancer la demande ». 
 
Mon ami Najib Mikou dans une tribune sur ces mêmes colonnes l’avait bien dit : « la solution n'est pas comptable, elle est stratégique »
 
Et pourtant cette loi de finances rectificative nous fait penser au pompier qui veut économiser de l’eau …
Le chef du gouvernement nous l’avait bien dit, il n’avait pas de vision. Le Conseil de gouvernement, réuni le mardi 7 juillet, a approuvé le projet de loi de finances rectificative pour l'année 2020, après son examen la veille en Conseil des ministres.

Le communiqué nous annonçait :

- 5 milliards de DH seront consacrés aux mécanismes de garantie des crédits de relance en faveur des entreprises, y compris dans le secteur public.

- Lancement d'une réforme institutionnelle de la Caisse centrale de Garantie.

- 15 milliards de DH seront ajoutés au budget des investissements budgétaires, qui va ainsi atteindre 86 milliards de DH.

 Le chef de l’Exécutif, avait annoncé qu’on devrait recourir à des actions urgentes à même de préserver le pouvoir d’achat des ménages.

Il y est également question de mesures de nature à soutenir la reprise des activités économiques, tout comme il serait procédé à la mise en place d'un système incitatif transitoire. Sur le plan budgétaire, il est prévu de renforcer les budgets des secteurs prioritaires, dont la Santé et l’Enseignement, ainsi que de reprogrammer les budgets de fonctionnement et d’équipement, selon les priorités.

Saâd-Eddine El Othmani avait évoqué des «ruptures» avec le passé en matière, d’économie et de gestion des finances publiques.

 Les partenariats internationaux du Maroc, ainsi que ses chaînes d’approvisionnement, devraient être revus, selon le chef du gouvernement.

 Il avait même évoqué les accords de libre-échange, signés par le Maroc avec ses partenaires commerciaux.

La présidente de la Commission Européenne avait proposé un plan de relance inédit de 750 milliards d’euros, soit environ 5,25% du produit intérieur brut de l’Union, pour financer une reprise économique paneuropéenne.

Le président américain a signé le CARES Act (pour Coronavirus Aid, Relief and Economic Security), déjà approuvé par le Sénat puis par la Chambre des représentants : 2 200 milliards de dollars soit trois fois plus que le plan de relance adopté après la crise financière de 2008 (plus de 12% du PIB). Un stimulus, un vrai.
 
Revenons à nos moutons et alertons quand même :

Demander des efforts aux Marocains, sans qu’ils aient le sentiment qu'ils sont répartis de manière équitable, ça ne marchera pas. Sans paix sociale, rien ne marche.

Le sentiment d’injustice de plusieurs catégories sociales était déjà là avant la crise. Je veux parler de la classe moyenne devenue ou en train de devenir pauvre.

D’une manière ou d’une autre et sans parler ni de larmes ni de sang, il faudra bien exiger des plus nantis des efforts supplémentaires. 

Certes, ce n’est pas LA solution pour améliorer les recettes mais ce n'est pas le sujet, c’est une question de principe. 

L'Impôt sur la fortune, nous dit- on, ne pourrait être que symbolique mais c’est de symbole qu’il s’agit.

Pour citer quelqu’un d’autre que Krugman, des amis me l’ont reproché, voilà un dialogue entre Zigong et Confucius :

Zigong : quelles sont les conditions nécessaires pour qu'un pays vive en paix ?

Confucius: des armes en suffisance, assez de vivres et la confiance du peuple.

Zigong : et s'il était nécessaire de négliger l'une des trois ?

Confucius : Aux forces militaires

Zigong: et s'il était nécessaire d'en négliger une seconde ?

Confucius: les vivres car si le peuple n'a pas confiance en ceux qui le gouvernent, c'en est fait de lui.
 
Maigrichonne, et très comptable la «  relance » de la LFR. Pour le reste on attendait le texte et les débats parlementaires, mais il est clair aujourd’hui que sans vision et sans volontarisme on n’ira pas loin. Le manque à gagner fiscal (43 milliards de DH) aurait été déterminant dans le choix de l’austérité. L’augmentation des droits de douane  de 30 à 40 % sur certains produits finis ne pourrait même pas rapporter 10% de ce manque à gagner. On croirait en définitive que c’est la pensée BAM qui a orienté le projet.

L’austérité tue, l’audace et le volontarisme payent.
 
Dr Samir Belahsen







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