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Interview avec Jaâfar Heikel« Le Maroc s’est bien sorti de la crise Covid-19 »

Candidat à la 9ème circonscription des Français de l’étranger


Rédigé par Safaa KSAANI Mercredi 22 Mars 2023

Trois ans après le début du premier confinement, Ramadan 2023 sera célébré sans état d’urgence sanitaire. L’occasion de mettre la lumière sur les conséquences oubliées de la pandémie et de ses retombées sur la refonte du système de santé.



Il y a trois ans, le 11 mars 2020, l’Organisation Mondiale de la Santé déclarait officiellement la pandémie de Covid-19. L'occasion de rappeler les dégâts causés...  

La Covid-19 était une expérience extrêmement difficile et douloureuse pour l’ensemble des pays du monde. C’est la première fois qu’une pandémie a eu un impact quadridimensionnel en tant que maladie infectieuse avec ses incidences, sa létalité et sa mortalité, mais également un impact sur les autres maladies puisqu’elle n’a pas permis l’accès aux services de la santé de beaucoup de maladies chroniques. On constate également des conséquences d’ordre social. Le confinement et la distanciation physique ont apporté leur lot de conséquences économiques : des personnes ont perdu leur emploi, des entreprises ont mis la clé sous la porte et on a enregistré des retards dans l’accomplissement de plusieurs projets, voire leur annulation.Notons que la pandémie a causé le décès de 6,6 millions personnes.  Trois pays ont eux-mêmes comptabilisé le tiers de ces décès. Il s’agit des États-Unis avec plus d’un million, le Brésil (plus de 600.000) et l’Inde (plus de 500.000).
 
Le Maroc a heureusement bien géré la crise grâce aux Orientations Royales et des décisions courageuses, et difficiles dans certains cas. Mais le pays s’en est très bien sorti bien qu’il a eu à déplorer un peu plus que 16.000 morts. La létalité y était parmi les plus faibles au monde.
 
A l’époque de la plus grave situation pandémique, nous étions à 1,2% de létalité pendant que des pays développés avaient une létalité deux à trois fois supérieure à la nôtre. 
 
Les décès ont touché toutes les couches de la population et tous les âges. Ceux qui ont payé les plus lourds tributs sont essentiellement les sujets âgés et porteurs de maladie chronique.
 
Quelles leçons doit-on en tirer ?  

Ce qu’on doit retenir comme leçon de cette pandémie c’est qu’aucun pays n’y était préparé, même les pays dont le système de santé était avancé. Le premier drame était enregistré en Italie où nous avons tous constaté qu’un pays développé, membre de l’Union Européenne, a été incapable de gérer le flux de patients et les décès. C’était également le cas en Espagne, en France, en Angleterre, aux Etats-Unis… 

Donc, tous les systèmes de santé n’y étaient pas préparés, malgré la connaissance des pandémies au cours du 20ème siècle comme le H1N1, l’Ebola, Zika ou encore le SIDA ; elles n’ont pas été des leçons retenues en faveur de la résilience des système de santé et de la pandémie du Covid-19.
 
Il a fallu un temps de réadaptation très long, qui a duré entre un an et demi et deux ans, pour que la situation soit stabilisée.
 
Cette résilience était extrêmement importante à retenir puisque c’était la capacité d’un système à avoir des lits de réanimation, la capacité d’un système à mobiliser des professionnels de santé, la capacité d’un système à trouver les médicaments, à trouver les mesures barrières qui sont les masques, les gants et les tenues de protection.
 
Le dernier élément que nous devons retenir, c’est que la vaccination était une arme essentielle pour éviter les complications, les hospitalisations et particulièrement chez les sujets âgés. C’est que la vaccination ne prévenait pas l’infection par la Covid-19 ou la transmission du virus, mais évitait essentiellement, dans un groupe de population particulier, les complications et l’hospitalisation.
 
Je crois que le Maroc a été un cas d’école extrêmement intéressant, puisqu’il a géré tant bien que mal cette crise avec un impact sanitaire doublé de l’aspect socio-économique.
Je rappelle que le Maroc a été l’un des pays où le confinement a le plus duré et où l’état d’urgence sanitaire a été le plus tard levé.
 
Par rapport à la connaissance scientifique, rappelons que ce virus a été connu en novembre 2019. On s’est aperçu que ce n’était pas une maladie infectieuse classique mais une maladie vasculaire qui entraînait des défaillances non seulement pulmonaires mais également d’autres organes. Avec le temps, nous avons su que cette maladie pouvait devenir chronique et s’installer dans la durée avec ce qu’on a appelé le Covid long.
C’est une maladie qu’on a appris à gérer, certes, mais qui nous donne encore un certain nombre de questions pour lesquelles on n’a pas de réponses, en particulier sur le Covid long.
 
Les médecins ont appris à gérer cette maladie devenue aujourd’hui une maladie grave dans la chronicité, mais qui s’est « banalisée » puisqu’elle est passée d’un stade de pandémie à un stade d’endémie légère. Dans la plupart des pays, le nombre de nouveaux cas est très faible malgré l’absence de distanciation sociale.
 
Le Covid long reste un problème de santé publique. Avons-nous davantage besoin d’investir dans la recherche pour mieux le comprendre et l'étudier ?  

A chaque fois qu’il y a une pandémie, la recherche scientifique devient nécessaire. Plus particulièrement la recherche vaccinale qui devra améliorer les types de vaccin, étant donné que le vaccin actuel a eu des effets positifs mais n’a pas donné tous les résultats attendus en raison des variants multiples apparus, en particulier les couches Alpha, Delta, Omicron et ses sous-variants. 

Le vaccin n’a pas pu donc assurer la protection nécessaire contre les variants, mais aura permis de ralentir l’évolution vers des complications graves, particulièrement chez les sujets âgés.
Grâce à l’Initiative Royale, le Maroc a créé un centre de biotechnologie à Benslimane, au niveau duquel sont mis au point les vaccins anti-Covid-19 et autres vaccins et médicaments permettant de lutter contre des maladies infectieuses, pour le marché national, continental et international. Donc, la recherche aura son mot à dire en post-crise. 
 

A quel point sommes-nous mieux préparés la prochaine fois que nous ferons face à une situation d'urgence ?  
Nous avons compris qu’il est important de mener plus de recherche-action, sur le terrain, et plus d’études épidémiologiques, évaluatives, d’impact, de déficience et d’efficacité des produits médicamenteux et des vaccins. Cela devient une nécessité pour se préparer à d’autres crises, non pas les prévoir mais planifier la riposte à ce genre de crise si elle devait survenir.


Durant ces années, le système de santé a connu une refonte. Quelle place est accordée à la gestion des situations d'urgence dans la Loi-cadre et quelle corrélation y a-t-il entre cette refonte et la pandémie ?
 
Dans le cas du Maroc, la pandémie a accéléré le processus de refonte du système de santé demandée par SM le Roi au gouvernement, depuis 2018 déjà, grâce à deux discours royaux extrêmement importants.

Le gouvernement s’est mis à l’œuvre de façon plus intense, pour généraliser la couverture médicale à l’ensemble des Marocains. Cela a été bénéfique par l’accélération du processus de refonte du système de santé qui est en cours. Un modèle organisationnel a été mis en place. Des agences ont été créées, d’autres restructurées.
 
La Loi-cadre 06-22 relative au système national de santé détermine les grandes orientations stratégiques de notre futur système de santé, à savoir la création de la Haute Autorité de Santé au niveau national, celles liées à la couverture sanitaire universelle mais également à la surveillance épidémiologique, à la formation et à une meilleure équité des ressources.
 
Au niveau régional, on note la création des groupements régionaux territoriaux, qui seront le nouveau bras d’exécution de la politique de santé au niveau régional, avec plus d’autonomie et de réponse aux besoins et à la demande de santé des citoyens. Ces aspects font partie du premier pilier fondamental de la refonte, qui est celui de la nouvelle gouvernance du nouveau système de santé, auquel il faudra ajouter une réflexion sur le modèle de financement.
 
Le deuxième pilier est lié à la valorisation des ressources humaines, la capacité de motiver et valoriser et de mieux répartir les ressources humaines. Le troisième pilier est celui de la remise à niveau des infrastructures, à savoir tout ce qui est centres de santé, hôpitaux, et construire un parcours de soins du patient coordonné avec le secteur privé.

Enfin, l’importance est donnée à la mise en place d’un système d’information sanitaire intégré, qui comprend tous les éléments qui concernent la maladie, et la digitalisation de l’information médicale, notamment le dossier médical, dans le respect de la confidentialité.
 
 
Recueillis par Safaa KSAANI
 
 
 
 
 
 
 
 
 








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