Le nouveau rapport « Global Economic Prospects » (Perspectives économiques mondiales) de la Banque Mondiale, publié mardi 10 juin, brosse un tableau prudent de l'économie mondiale, anticipant sa plus faible croissance depuis la crise financière de 2008. L'escalade des tensions commerciales et une incertitude politique globale persistante sont identifiées comme les principaux freins. Le rapport apporte également un éclairage spécifique sur des économies régionales, dont le Maroc, qui navigue entre résilience face à des chocs et vulnérabilités structurelles.
Les prévisions pour 2025 ont été revues à la baisse pour près de 70 % des économies mondiales, avec une croissance mondiale qui devrait ralentir à 2,3 %. Si cette projection se confirme, la période 2020-2026 connaîtra la croissance moyenne la plus faible depuis les années 1960.
L'Afrique en plein essor Pour l'Afrique, les prévisions économiques de la Banque Mondiale sont prometteuses, avec une croissance attendue en hausse dans plusieurs régions clés. Ainsi, la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) devrait afficher une croissance de 2,7 % en 2025 et s'accélérer à 3,9 % en moyenne pour 2026-2027. De son côté, l'Afrique subsaharienne devrait atteindre 3,7 % la même année, avec une projection de 4,2 % pour 2026-2027. Cette croissance est alimentée par une demande intérieure robuste, des investissements dans les infrastructures et une amélioration de la productivité agricole.
En somme, la croissance économique en Afrique est soutenue par divers facteurs, notamment l'amélioration des infrastructures, l'expansion des secteurs économiques clés et une meilleure gestion des politiques économiques. Les investissements dans les infrastructures, tels que les routes, les ports et les réseaux de télécommunication, jouent un rôle crucial dans la stimulation de la croissance.
D’après la Banque Mondiale, les perspectives économiques du continent sont encourageantes, avec des prévisions de croissance en hausse pour les prochaines années. Les efforts continus pour améliorer les infrastructures, renforcer les politiques économiques et diversifier les secteurs économiques seront essentiels pour maintenir cette dynamique positive.
Reprise économique au Maroc face aux vents contraires
Pour le Maroc, la Banque Mondiale note que l'activité du secteur privé a montré des signes de reprise en 2024, en partie grâce à la réduction des tensions politiques et à la stabilisation macroéconomique dans plusieurs régions. « L'activité industrielle, en particulier dans la construction, s'est renforcée au Maroc, accompagnée d'une reprise de la demande intérieure », écrit la Banque Mondiale, soulignant que ce dynamisme témoigne d'une certaine résilience de l'économie marocaine face à un contexte international morose.
Cependant, ses prévisions de croissance sont tempérées. La Banque anticipe un taux de croissance de 3,6 % en 2025 et 3,5 % en 2026. Pour 2027, la projection est de 3,6 %, sous réserve « d'une amélioration des conditions climatiques permettant une reprise de la production agricole ». Néanmoins, l'activité industrielle devrait ralentir, reflétant « en partie la baisse des prix des phosphates due à une demande extérieure réduite ».
Vulnérabilité aux chocs climatiques
La Banque Mondiale insiste, par ailleurs, sur une vulnérabilité majeure des économies de la région aux phénomènes météorologiques extrêmes. "De nombreuses économies de la région sont vulnérables aux phénomènes météorologiques extrêmes, notamment les vagues de chaleur, les sécheresses et les inondations, qui pourraient ralentir la croissance de la production et de la productivité", avertit l'institution de Bretton Woods.
Le Maroc, en tant qu'économie fortement dépendante du secteur agricole, est particulièrement exposé aux conditions de sécheresse. La Banque Mondiale précise que cela pourrait « affecter de manière aiguë les économies fortement dépendantes du secteur agricole, comme le Maroc, aggravant les conditions de vie et augmentant la pauvreté ». Des événements météorologiques plus fréquents et plus intenses risquent également de provoquer des flambées des prix alimentaires, d'exacerber la pauvreté et l'insécurité alimentaire, et de nuire au capital humain à long terme par des perturbations scolaires ou des déplacements de travailleurs.
Recommandations
Face à ce tableau, Indermit Gill, économiste en chef de la Banque Mondiale, souligne que "en dehors de l’Asie, le monde en développement entre de plus en plus dans une ère de stagnation", une menace qui pèse depuis plus d'une décennie. La Banque Mondiale insiste alors sur l'urgence d'une coopération mondiale pour stabiliser l'environnement commercial international et d'un soutien accru aux pays vulnérables.
Pour le Maroc et d'autres économies en développement, le rapport réitère la nécessité de mobiliser les recettes intérieures, de prioriser les dépenses en faveur des ménages les plus vulnérables et de renforcer les cadres budgétaires. Pour accélérer la croissance, il est crucial d'améliorer le climat des affaires, de promouvoir l'emploi productif en dotant les travailleurs des compétences nécessaires et en facilitant l'adéquation entre l'offre et la demande sur le marché du travail. Une collaboration mondiale est également jugée indispensable pour soutenir les économies les plus vulnérables.
Malgré les défis posés par le climat et la conjoncture mondiale, le rapport souligne que le Maroc a montré des signes de résilience. La solution résidera dans la poursuite des réformes et des investissements pour consolider ces acquis et atténuer les vulnérabilités, notamment celles liées aux aléas climatiques.
A. CHANNAJE
Le Maroc 63ème en matière de transparence financière
L'Indice de secret financier FSI (Financial Secrecy Index 2025), publié le 3 juin par l'ONG Tax Justice Network, met en lumière le rôle des nations dans la facilitation du secret financier et du blanchiment d'argent. Cet indice, qui évalue les systèmes financiers et juridiques des pays sur une échelle de 0 (transparence totale) à 100 (secret total), offre une perspective cruciale sur les défis de la transparence financière mondiale.
Pour cette édition 2025, le Maroc se classe à la 63ème position sur 133 pays, avec un score de secret de 45. Ce résultat le situe dans le milieu du tableau, suggérant des efforts en matière de transparence, mais aussi des marges d'amélioration significatives. Comparé à d'autres nations de la région, le Maroc se positionne de manière contrastée : Koweït (47ème rang mondial), Algérie (33ème), Égypte (41ème), et Tunisie (110ème).
Ces chiffres montrent que, si certains pays de la région affichent des niveaux de secret financier plus élevés, le Maroc se situe dans une zone où la vigilance reste de mise.
Selon Tax Justice Network, l'Indice de secret financier est devenu un instrument indispensable pour les gouvernements, les organisations internationales, les journalistes et les universitaires. Il permet de mieux comprendre les mécanismes du secret financier global et de renforcer la lutte contre l'évasion fiscale, la corruption et le blanchiment d'argent. En identifiant les juridictions qui facilitent ces pratiques, le FSI encourage les réformes et la mise en œuvre de normes internationales plus strictes en matière de transparence.
Le score de 45 du Maroc indique que le pays a mis en place certaines mesures pour contrer le secret financier, mais qu'il existe encore des lacunes. Ces lacunes pourraient concerner divers aspects, tels que la transparence des bénéficiaires effectifs des entreprises, l'échange automatique d'informations fiscales ou la réglementation des professions non financières désignées (avocats, comptables, etc.).