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Dette extérieure : Un excès de dette publique qui embrouille les cartes de l’Exécutif


Rédigé par Anass MACHLOUKH Mardi 9 Août 2022

Alors que le gouvernement songe à faire une sortie à l’international, l’encours de la dette extérieure continue d’augmenter. La poursuite de la crise et le recul de la croissance vont mettre l’Exécutif devant des scénarios difficiles. Détails.



Personne ne s’attendait à ce que le gouvernement, porteur d’une volonté de réforme, se verra heurté à une crise aussi dure et inopinée que celle que l’on vit actuellement. En dépit des coups de massue subis par les caisses publiques, d’où on a tiré des sommes importantes et non-prévues dans le PLF 2022 pour renforcer le pouvoir d’achat, le gouvernement se dit engagé à tenir scrupuleusement et loyalement les engagements sociaux pris dans le programme gouvernemental. Raison pour laquelle le budget d’investissement (245 MMDH) est resté intact malgré les dépenses additionnelles vouées à la stabilisation du pouvoir d’achat (aide aux transporteurs, plan d’urgence pour le tourisme et celui pour l’agriculture pour venir en aide au monde rural, touché par une sécheresse sans précédent).

Alors que la croissance est en deçà des prévisions, les indicateurs de la dette publique bougent sans laisser personne indifférent. Force est de constater que le Trésor a été endetté à la fin de 2021 à hauteur de 69,8%. Cette proportion va culminer à 72,4% à l’issue de l’année courante, selon les chiffres du ministère de l’Economie et des Finances. Heureusement que la hausse des recettes fiscales, qui devrait se poursuivre, à en croire les prévisions de l’Exécutif, va permettre d’éviter un enlisement du déficit budgétaire, libérant ainsi les finances publiques d’une certaine pression.

Cependant, la dette demeure d’autant plus inquiétante que sa part extérieure est quand même importante. Celle-ci a augmenté de 3,8% à fin mars, sachant que l’encours se situe à 388,1 MMDH, selon le récent bulletin du ministère de l’Economie et des Finances. Ce chiffre reste supérieur au niveau observé durant la même période de l’année précédente (373,7 MMDH). Il convient de rappeler ici que la dette extérieure n’a évolué que de 2,5% au premier trimestre de 2021.

La part du Trésor a cru mais très légèrement, en passant de 53,8% à 54%. En 2022, le Trésor a mobilisé 2,1 milliards de dirhams en plus d’un demi-milliard. Le reste de la dette est détenu par les établissements et entreprises publiques qui ont emprunté 1,3 milliard de dirhams cette année. En réalité, on peut se réjouir que l’essentiel de la dette du Trésor émane de l’intérieur plus que de l’extérieur.

En effet, la composante intérieure représente 74,6% tandis que les créanciers internationaux en disposent d’une part de 23,6%. En gros, les perspectives futures ne sont pas rassurantes. La dette publique en général devrait s’accroître pour passer à 83,3% du PIB au lieu de 82,5% en 2021. C’est en tout cas ce que prévoit le Haut-Commissariat au Plan.

Vers une sortie à l’international imminente ?

A présent, le gouvernement étudie les scénarios d’une sortie à l’international pour emprunter près de quatre milliards de dirhams sur les marchés financiers, comme le permet la Loi des Finances. Actuellement, il n’est pas encore certain que le Royaume fasse une telle sortie, le gouvernement ne s’y est pas encore décidé et continue d’observer la situation. Il semble que les autorités marocaines préfèrent le FMI qui propose une ligne de financement modulable, dont les conditions sont jugées plus confortables et plus sûres.

Si le Maroc semble vouloir éviter les marchés internationaux, c’est à cause de leur agitation et leur instabilité. Cela pose le problème de la charge de la dette (intérêts) qui ne cesse de croître dans la foulée de l’envolée des taux d’intérêts décidés par les plus grandes Banques centrales à l’échelon international (Reserve Fédérale et Banque centrale européenne). D’où l’appétence pour les lignes de crédit du FMI. Mais cette option n’est pas sans risques. Tout recours à l’endettement extérieur s’avère onéreux vu l’appréciation du dollar, sachant qu’une grande partie de la dette extérieure du Royaume est libellée en cette devise. Quoi qu’il en soit, ce choix est censé être fait après longue réflexion.



Anass MACHLOUKH

3 questions à Omar Kettani

Dette extérieure : Un excès de dette publique qui embrouille les cartes de l’Exécutif

« Il vaut mieux que tout emprunt futur soit à moyen terme »
 
Omar Kettani, économiste et Professeur à l’Université Mohammed V de Rabat, a répondu à nos questions sur la dette publique.

- La dette publique est-elle inquiétante à votre avis ?

- La dette publique est inquiétante suivant la lecture qu’on en fasse. Mettons les choses au clair et faisons un calcul. Le Maroc réalise une croissance en moyenne, si on prend la dernière décennie, de 3%. Si on rapporte ce chiffre sur la part de la dette publique par rapport au PIB, ça nous donne 20 ans de remboursement. Je crains que si l’on continue à réaliser des taux de croissance aussi faibles, il serait difficile de s’engager dans des emprunts aussi ambitieux auprès des marchés internationaux.


- Combien faut-il de croissance pour que la dette ne soit plus inquiétante ? 

- A mon avis, il nous faut 6% de croissance dans les prochaines années, on sera toujours condamnés à s’endetter pour rembourser des dettes déjà existantes et non pas pour investir. C’est un cercle vicieux qui dure depuis les années 80.


- Le Maroc envisage une nouvelle sortie à l’international, quel est le meilleur scénario possible à votre avis ?

- Il est préférable que l’emprunt se fasse à moyen terme parce que cela permet de mieux étudier l’utilité de la dette qui doit impérativement orienter vers l’investissement, sachant que dès que l’on commence à financer les dépenses de fonctionnement par la dette, on s’empêtre dans une équation insoluble.


Recueillis par A. M.

 








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