Depuis plusieurs semaines, les réseaux sociaux bruissent de discussions sur la grippe saisonnière, qui, cette année, cause de nombreux désagréments aux malades. Ses symptômes ressemblent beaucoup à ceux du Covid-19, bien que sa gravité soit généralement moindre. Cette similitude a créé une certaine confusion et inquiété la population, d’aucuns estimant que les séquelles de la crise sanitaire passée n’étaient pas proportionnelles à la gravité de la grippe actuelle. L’inquiétude reste néanmoins justifiée du fait que le dernier bulletin sanitaire de la tutelle indique une hausse des consultations liées à des syndromes grippaux, avec une progression de 60% le mois dernier. «La grippe saisonnière n’est pas une maladie bénigne, surtout pas pour tout le monde», rappelle Dr Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en systèmes de santé. Elle est rarement grave chez les jeunes en bonne santé, mais peut s’avérer sévère chez les personnes vulnérables. C’est pourquoi les professionnels de santé recommandent la vaccination dès le début de l’automne, laquelle protège jusqu’à 90% contre l’infection et de 50 à 80% contre les formes graves et la mortalité chez les personnes âgées. «Une vaccination sûre et efficace, largement éprouvée depuis près de 80 ans et des milliards de doses administrées», précise Dr Hamdi.
Retour aux vaccins et aux gestes barrières
Cela dit, la composition du vaccin change chaque année à cause des changements survenus sur les souches virales. La nouvelle version du vaccin est disponible au début de l’automne. «Il est conseillé de se faire vacciner en octobre ou novembre, car la protection complète n’intervient qu’environ deux semaines après l’injection», explique Dr Hamdi. Les vaccins ne sont, certes, pas adaptés aux nourrissons de moins de six mois, mais la vaccination des femmes enceintes protège à la fois la mère et l’enfant grâce aux anticorps transmis via le lait maternel. Dans le même sillage, Dr Said Afif, pédiatre, souligne l’importance de mesures préventives pour les nourrissons de moins de trois mois : se laver les mains avant tout contact, limiter les câlins et éviter le contact rapproché avec des frères et sœurs revenant de l’école, pendant 3 à 4 jours. Pour sa part, Oumayma Khouader, pharmacienne, rappelle l’importance des gestes barrières dans les lieux publics et les transports : se laver régulièrement les mains, jeter immédiatement les mouchoirs utilisés, etc. Elle ajoute que la grippe peut provoquer la fièvre (38 à 40 °C), frissons, toux sèche, fatigue, écoulement nasal, maux de gorge, douleurs musculaires, voire vomissements et diarrhée.
Vaccin Covid et baisse immunitaire
En outre, nos experts excluent toute relation entre le vaccin Covid et la baisse de l’immunité des individus, et encore moins avec la vulnérabilité à la grippe. «Un vaccin ne peut être que bénéfique, il peut avoir des effets secondaires, mais il ne diminue pas l’immunité», affirme Pr Moulay Mustapha Ennaji, directeur du Laboratoire de virologie de l’Université Hassan II. Dr Hamdi renchérit que «la vaccination n’affaiblit jamais l’immunité. Elle la stimule pour faire face efficacement à des infections ciblées». Il regrette toutefois le faible engouement des Marocains pour la vaccination antigrippale, alors qu’elle pourrait considérablement réduire la circulation et l’impact du virus. Pour cette saison, les autorités sanitaires marocaines proposent un vaccin quadrivalent, pour offrir en principe une protection élargie contre quatre souches du virus. Une décision néanmoins à reconsidérer par la tutelle, du moment que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et les CDC recommandent le passage des vaccins quadrivalents aux trivalents (3 souches), car la lignée de grippe B/Yamagata n'est plus considérée comme circulante. Le vaccin trivalent protège contre deux virus A (H1N1 et H3N2) et une souche de virus B (lignée B/Victoria). Non seulement la protection est plus efficace, mais le prix est également largement plus abordable.
Souhail AMRABI
3 questions au Dr Tayeb Hamdi : « Une mutation majeure pourrait provoquer une pandémie, mais cela reste exceptionnel »
- Les consultations pour syndromes grippaux ont augmenté de 60% ces dernières semaines. Comment expliquez-vous cette hausse et quels en sont les principaux facteurs ?
Nous sommes dans la saison de la grippe, c’est-à-dire l’hiver, et cela explique en grande partie cette hausse. Pendant cette période, les défenses de l’organisme sont plus fragiles et nous passons davantage de temps dans des espaces clos pour nous protéger du froid. Les virus circulent plus facilement sur les surfaces communes comme les poignées de porte ou dans les espaces partagés. La basse température favorise également leur survie, ce qui augmente le risque de contamination, à la fois de manière directe et indirecte. Les enfants jouent un rôle particulièrement important dans la propagation. Lorsqu’un enfant attrape le virus à l’école, il peut le transmettre à ses camarades, qui le rapportent ensuite à leur famille. Cette transmission successive explique pourquoi les épidémies hivernales peuvent se propager rapidement et de façon exponentielle.
- Quels sont les symptômes de la grippe saisonnière et peuvent-ils changer avec les mutations ou le climat ?
Les symptômes typiques de la grippe incluent une fièvre élevée pouvant atteindre 39 ou 40°C, un nez qui coule, des douleurs articulaires, parfois des frissons et parfois des troubles digestifs comme la diarrhée ou les vomissements. Ces symptômes sont constants d’une année à l’autre. Le virus de la grippe mute chaque année, mais ces mutations sont mineures. Elles n’influencent pas vraiment les symptômes et servent surtout à adapter le vaccin chaque saison. Une mutation majeure pourrait provoquer une pandémie, mais cela reste exceptionnel. Quant au changement climatique, il n’a pas d’effet direct sur les mutations du virus, même s’il peut accélérer la propagation des épidémies.
- La Covid-19 circule-t-elle toujours et est-elle devenue plus difficile à traiter ?
Oui, le virus circule encore et continuera probablement à circuler pendant longtemps. Le Covid-19 tend à devenir saisonnier, comme la grippe, mais il reste encore parfois extra-saisonnier. On peut donc observer des cas à n’importe quelle période de l’année, surtout lorsqu’apparaît une nouvelle mutation. Pour l’instant, le virus n’est ni plus dangereux ni plus virulent qu’auparavant. Les infections tendent même à être moins graves grâce à l’immunité acquise par la population, que ce soit par les vaccins ou par les infections passées. Toutefois, certaines personnes restent vulnérables, notamment les plus de 65 ans, les diabétiques, les personnes obèses ou les femmes enceintes, et elles doivent continuer à se protéger. Il est parfois difficile de distinguer une grippe d’un Covid-19 simplement par les symptômes, surtout en hiver. Un test est nécessaire pour le confirmer. En revanche, pendant l’été, si une personne présente des symptômes comme de la fièvre ou des courbatures, il est très probable qu’il s’agisse de Covid-19, car la grippe saisonnière est rare hors saison. Cela dit, il n’y a pas de raison de s’inquiéter pour le Covid-19 aujourd’hui. Le virus reste présent mais circule dans un contexte où notre immunité est de plus en plus renforcée, ce qui réduit l’impact de l’infection pour la grande majorité de la population.
Vaccin contre la grippe : Groupes prioritaires, efficacité et sécurité
La vaccination contre la grippe offre une protection comprise entre 50 et 90% contre l’infection, selon la virulence des souches en circulation, l’état immunitaire des personnes et leur âge. Chez les personnes âgées, elle réduit de 30 à 80% le risque de formes graves et diminue la mortalité de 50 à 80%. Le vaccin est recommandé à toute personne de plus de six mois, mais il est prioritairement destiné aux groupes à risque élevé de complications, notamment les personnes âgées de plus de 65 ans, les jeunes enfants de six mois à cinq ans, celles atteintes de maladies chroniques (diabète, hypertension, asthme…) ou d’affections du système immunitaire, les femmes enceintes et les personnes en situation d’obésité. Il est également conseillé aux groupes à risque de contamination ou de transmission, comme les professionnels de santé et les proches des personnes vulnérables. La vaccination contre la grippe bénéficie d’un long historique de sécurité et d’efficacité, avec près de 80 ans d’utilisation et des milliards de doses administrées dans le monde.
OMS : Nouvelles lignes directrices sur la grippe
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a mis à jour ses lignes directrices destinées aux professionnels de santé pour la prise en charge des patients atteints de la grippe. Ces recommandations constituent également une référence pour les décideurs engagés dans la préparation aux épidémies et aux pandémies. Chaque année, la grippe saisonnière touche près d’un milliard de personnes dans le monde, dont 3 à 5 millions développent une forme sévère, entraînant entre 290.000 et 650.000 décès liés à des complications respiratoires. Au-delà de la grippe saisonnière, certains virus de la grippe animale - notamment aviaire et porcine - peuvent infecter l’être humain et provoquer des formes allant d’infections bénignes à des pneumonies graves. Bien qu’ils ne se transmettent pas entre humains à ce stade, leur potentiel pandémique demeure une préoccupation majeure.
Les nouvelles lignes directrices de l’OMS précisent l’usage des antiviraux et d’autres traitements, tels que les stéroïdes, pour les infections dues aux virus saisonniers, aux virus à potentiel pandémique et aux nouveaux virus de type A connus pour provoquer des formes sévères. Leur élaboration repose sur l’approche méthodologique GRADE, mobilisant des expertes, cliniciens, éthiciennes et spécialistes de la méthodologie. Ces recommandations s’intègrent dans la stratégie mondiale de lutte contre la grippe, articulée autour du réseau de surveillance GISRS et du Cadre de préparation à la grippe pandémique (PIP), visant à renforcer l’accès aux traitements et outils essentiels.
Les nouvelles lignes directrices de l’OMS précisent l’usage des antiviraux et d’autres traitements, tels que les stéroïdes, pour les infections dues aux virus saisonniers, aux virus à potentiel pandémique et aux nouveaux virus de type A connus pour provoquer des formes sévères. Leur élaboration repose sur l’approche méthodologique GRADE, mobilisant des expertes, cliniciens, éthiciennes et spécialistes de la méthodologie. Ces recommandations s’intègrent dans la stratégie mondiale de lutte contre la grippe, articulée autour du réseau de surveillance GISRS et du Cadre de préparation à la grippe pandémique (PIP), visant à renforcer l’accès aux traitements et outils essentiels.











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